Banques : Greenspan et les autres

La qualité la plus remarquable d’Alan Greenspan était qu’il savait expliquer clairement (pour ceux qui se donnaient la peine de décrypter correctement ses discours) les problèmes qui se posaient à un moment donné en indiquant les bonnes solutions.

Rien de tel évidemment avec son successeur, le bombardier furtif.

Dans ce qui sera sans doute son dernier grand message, Alan Greenspan a donné son avis sur les problèmes bancaires, qui n’est que la répétition de ses analyses antérieures et que j’ai repris…

Les banques sont des entreprises très particulières : leur activité principale consiste à prêter de l’argent qu’elles n’ont pas mais qu’elles empruntent sur les marchés (ou dont elles disposent avec les dépôts de leurs clients).

Tout système bancaire repose donc sur la confiance.

Pour cela, les banques doivent respecter des règles de bonne gestion : la principale est que les banques ne doivent pas emprunter plus de 10 fois le montant de leurs capitaux propres.

C’est le fameux leverage, le multiple d’endettement que je désigne par la lettre µ pour simplifier. C’est aussi son inverse : le ratio Tier 1 réel, d’origine.

Tout est simple. Toute règle doit être simple pour être efficace.

En effet, depuis les années 80, Alan Greenspan et ses collaborateurs ont défendu cette règle (en adoptant précédemment un leverage de 12) car statistiquement, la probabilité pour que les banques qui respectent cette règle aient des difficultés majeures au point de pouvoir tomber en faillite, est négligeable voire nulle.

Cette règle est facilement vérifiable pour toutes les banques dans le monde : il suffit de prendre les chiffres du montant des véritables capitaux propres réels, le reste du bilan étant par définition constitué de dettes.

C’est simple. Tout est simple, trop simple pour les dirigeants des trop grandes banques qui ont réussi à tout compliquer pour que tous les innombrables idiots nuisibles ne comprennent absolument plus rien à ces problèmes financiers élémentaires qu’ils comprenaient déjà difficilement auparavant.

Ainsi sont nées une réglementation extraordinairement complexe et les études les plus sophistiquées sur ce sujet, dont les plus pertinentes aboutissent aux mêmes résultats que ceux que l’on obtient en suivant les préconisations simples de ce bon vieux Greenspan.

Un article du Temps qui m’a été signalé par d’honorables lecteurs helvètes (que je remercie) rend compte d’une de ces études faite en particulier par le Centre pour la gestion des risques à Lausanne (CRML) d’HEC Lausanne.

Cliquer ici pour le lire.
Cliquer ici pour lire mon article le plus récent sur les banques systémiques mondiales.

13 réflexions sur “Banques : Greenspan et les autres”

  1. M. Chevallier,
    Existe t-il un lien entre le monétarisme et la valeur intrinsèque des devises.
    Selon vos analyses le dollar devrait être beaucoup plus fort par rapport à l’euro puisque l’argent y est sain contrairement à l’euro. N’est-ce pas le principe des monnaies flottantes que de s’ajuster en fonction des fondamentaux de leurs pays respectifs?
    Ainsi, comment peut-on expliquer cette faiblesse du billet vert par rapport à l’euro?
    Pourriez-vous m’éclairer sur ce point?
    Cdt

    1. C’est vrai, je me pose aussi la même question.
      De même que pour le Bund et le 10 ans US, le Bund ne devrait-il pas être plus élevé que le 10 ans US ! ?

  2. bonsoir.pour rejoindre certains de vos dire.

    Euro/Franc suisse : quand la bulle éclatera…

    Publié le 16/01/2013

    La Banque Nationale Suisse a choisi de limiter les variations du Franc suisse par rapport à l’Euro. Un choix qui aura des répercussions importantes lorsque la bulle éclatera.

    Par Pierre Chappaz.

    Les conséquences de la décision de la Banque Nationale Suisse (BNS) d’attacher le Franc suisse à l’Euro sont rarement discutées. Il s’agit pourtant d’une action dont les conséquences vont bien au-delà de la Suisse.

    Face aux anciennes monnaies européennes, puis face à l’Euro, le Franc suisse a historiquement toujours été dans le sens de la hausse. Un pays plutôt bien géré, un centre financier puissant, tels sont les deux principaux facteurs qui ont de tout temps fait de la monnaie helvétique une monnaie-refuge.

    Avec la crise de l’Euro à partir de 2010, la hausse du Franc suisse a connu une accélération foudroyante, suscitant les inquiétudes des exportateurs de la confédération, largement relayées par la presse.

    La BNS a donc décidé en Septembre 2011 de mettre un terme à cette hausse, en fixant un cours maximum de 1 Euro = 1,20 Chf. Depuis elle soutient l’Euro en procédant à des achats « illimités ».

    On ne saura jamais ce qui se serait passé si la BNS n’avait pas décidé d’arrimer le Franc à l’Euro. Les industries exportatrices suisses auraient sans doute souffert pour un temps, mais on peut penser que leur positionnement haut-de-gamme et leur habitude ancienne d’une monnaie forte leur auraient finalement permis de s’adapter sans trop de casse. De plus, d’autres armes étaient à la disposition de la banque centrale suisse pour ramener le Franc a un niveau plus aisément supportable : des taux d’intérêt négatifs par exemple.

    On ne le saura jamais, mais ce qu’on sait maintenant, c’est que cette décision a des conséquences très difficilement réversibles.

    Pour défendre le Franc et donc l’empêcher de monter au-delà du cours fixé, la BNS achète des Euros et d’autres devises. Déjà près de 200 milliards d’Euros, qui sont placés en obligations d’État allemandes et françaises.

    Après avoir failli s’effondrer en 2012, la monnaie européenne remonte un peu de ce moment, grâce aux achats de la Banque Nationale Suisse, mais plus encore aux effets du 3e quantitative easing aux US et de la nouvelle politique d’expansion monétaire à outrance au Japon. Il y a une véritable course à la dévaluation entre les grandes devises : Dollar, Euro et Yen, chacun espérant gagner des parts de marché à l’export.

    L’Euro va un peu mieux, mais ce n’est qu’un sursis car les problèmes économiques de la zone ne sont pas réglés, en particulier la divergence de compétitivité entre les économies du Nord et du Sud de l’Europe.

    En l’absence de dévaluation possible de leurs défuntes monnaies nationales, les PIGS (Italie, Espagne, Grèce, Portugal) sont condamnés à baisser les salaires pour essayer de rattraper leur gap de compétitivité avec l’Allemagne. Mais la baisse de salaires est socialement beaucoup plus difficile à faire accepter à leur population qu’une dévaluation car elle réduit bien plus directement le pouvoir d’achat. En Grèce les salaires des fonctionnaires ont déjà été réduits de 30%. Et toute hausse de l’Euro ne peut qu’aggraver la situation de ces pays.

    La France, de son côté, ne fait rien de sérieux pour regagner sa compétitivité perdue. Elle est dans le déni, pour reprendre le terme employé en couverture de The Economist. Ce qui est paradoxal, c’est que la BNS favorise ce déni en achetant massivement les obligations d’État françaises, ce qui maintient les taux très bas. En voulant empêcher le Franc suisse de monter, la BNS alimente la bulle de la dette en France !

    La crise de l’Euro va continuer de se diffuser dans l’économie réelle. Après les avoir droguées au crédit pas cher, l’Euro ruine les économies du Sud de l’Europe.

    Les taux de chômage vont donc monter en 2013 en Espagne, Italie, France. La dette de ces États aussi. La fuite en avant monétaire (la Banque Centrale Européenne qui prête aux banques pour qu’elles achètent la dette des États etc.) permet d’éviter l’explosion immédiate du système financier, mais elle fait encore gonfler la bulle d’endettement, qui fera d’autant plus de dégâts quand elle éclatera.

    À la prochaine alerte sur l’Euro, sommes-nous certains que la BNS va pouvoir en acheter assez pour défendre le cours de 1,20 ? Et si les digues devaient céder, à quelles pertes devrait-elle faire face ? Avec quelles conséquences pour la Suisse, l’Euro et le système monétaire international ?

    En vérité les banques centrales, qui sont les grandes responsables de la crise d’endettement , se tiennent toutes par la barbichette. Si l’une défaille, elles tombent toutes.

    En 2013 elles vont donc continuer à faire tourner leurs planches à billets, et ça peut durer encore un bon moment, à en juger par le Japon qui creuse sa dette allègrement au-delà des 200% du PIB. Un bon moment, mais pas éternellement.

    On a jamais vu de bulle qui gonfle, qui gonfle… et qui ne finisse pas par éclater.

    source contrepoints

  3. Contrairement à ce que certains ont pu dire ici, mais ce n’est que mon avis bien entendu, faire exploser l’euro pour les américains, ne consiste pas à le faire chuter, mais à le voir monter.
    Ce qui fait baisser le billet vert actuellement ce n’est que la spéculation engendré par le doute sur le plafond de la dette. Un doute est un doute. Tant qu’il persiste il laissera de la volatilité sur les marchés, même les marchés de devise.
    Cela arrange bien les américains, qui se font un malin plaisir d’entretenir le doute avec des discours discordants, afin que le billet vert puisse être profitable aux exportations US et ainsi améliorer leur balance commercial.
    La dialectique et les discours sont finalement plus important actuellement que le marché lui même.

    Concernant le franc suisse, ce dernier a subit un mouvement baissier si on regarde son graphique hebdomadaire, qui a enclenché une décision importante de la BNS il y a quelques temps qui prenait des positions sur des points clés.
    Il est dans une configuration actuellement purement technique pour moi. Il y a une méfiance à l’égard de ce dernier compte tenu de son exposition à la crise de la zone euro.
    Chacun ayant des problème il est nécessaire de regarder d’autres paires de devises afin de suivre la valeur des monnaies face à d’autres économies que la zone euro et les US. Regardez par exemple l’AUD face à l’euro au franc suisse, et au dollard, cela donne une idée de leur valeur indépendante.
    Pour le franc suisse, il retrace donc la baisse réalisée, et devrait remonter jusqu’au 1.23X qui correspond à un retracement fibonacci. Une fois ce retracement terminé la vigilance sera de rigueur.

    Olivier

  4. @ratel.
    Mon point de vue…qui n’engage que moi:

    En vertu de sa position géographique, la Suisse joue la « solidarité » du « bloc de l’ouest européen »
    La situation Géopolitique étant bien différente de ce qui prévalait il y a 50 ans.
    La Suisse n’est aujourd’hui plus le paradis fiscal qu’elle était encore il y a peu et ampute partiellement son avenir économique. (les capitaux cherchants paradis préfèrent Hong-Kong par exemple).
    Sa position économique sur le luxe n’est pas « garantie » et l’arrimage a l’euro permet de le maintenir pour un temps. On peux imaginer a long terme que la délocalisation concernera aussi le luxe.
    Bref, la Suisse est en transition et sa politique monétaire en est le reflet.

  5. @ rogger :

    Je suis profondément d’accord avec vous. J’ai même eu des discussions surréalistes avec des financiers de très très très haut niveau (gestion de fonds souverains, de têtes couronnées enturbannées, de milliardaires en tout genre, etc…). Cela fait au moins 3 ans que j’ai entendu une phrase qui, n’ayant pas toutes les clés pour le comprendre à l’époque, m’avait particulièrement surpris : « la Suisse, c’est mort ».

    Si ces gens-là qui « font » l’économie pensent ça depuis plusieurs années, ce devait être à juste titre…. Mr Chevallier nous aide à voir non pas la partie émergée de l’iceberg mais également une bonne partie du bébé ! On « voit » que ça ne va pas.
    Mais peut-être que ce n’est RIEN comparé au tsunami maintes fois annoncé… sans faire de prophéties auto-réalisatrices, loin de moi cette idée….

  6. Je remercie Schäuble qui ce jour s’est exprimé, je cite:

    Partout dans le monde, il y a des dettes publiques qui sont à des niveaux plus élevés qu’en zone euro »

    « La Grande-Bretagne a un niveau de dette plus élevé que la moyenne de la zone euro, les Etats-Unis, je ne veux même pas en parler »

  7. On peut en effet le remercier toutefois, pour l’analogie:
    C’est la différence entre le patient qui a le cancer, et celui qui a le cancer et les métastases en plus.
    Finalement on doit donc être content d’avoir le cancer ?
    Quand mon fils a une note qui tourne vers 13, je lui dis que c’est nul.. il me répond que je cite « les autres… » je ne le laisse en général aps finir ses phrases et ma réponse est claire:
    « pour les notes, les autres je m’en fou » idem pour les punitions.
    Hé bien là, si il faut se satisfaire de la comparaison avec les autres…. hé bien c’est la porte ouverte à la fuite en avant.
    De plus comparer des économies totalement différentes n’a strictement aucun sens, les politiques sociales par exemple ne sont pas du tout les mêmes entre ces 3 « régions  » et ce n’est qu’un exemple, la fiscalité est différente etc… donc c’est un cancer différent. et comme en médecine y a des cancers qui se guérissent et d’autres non.

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