BCE, Fed, bons et idiots…

Un petit point semble s’imposer après les dernières décisions des Marioles de la BCE (en fait un rappel de ce que j’ai déjà écrit à ce sujet à maintes reprises)…

Le point de départ est encore et toujours l’argent non gagné qui circule dans la zone euro : au moins 3 500 milliards d’euros qui se trouvent indument dans l’agrégat monétaire M1 c’est à dire sur les comptes courants et dans les portefeuilles des heureux €-zonards, et qui ne se trouvent pas dans les réserves en devises de la Buba, cf. mes articles antérieurs à ce sujet (c’est tellement énorme que je suis à ma connaissance le seul à le voir !).

Ensuite se trouvent les déficits des balances commerciales de ces cochons de pays du Club Med (dont la France) qui sont compensés par les excédents de l’Allemagne. Cette divergence vient du fait que les niveaux et gains de productivité globale sont très différents entre ces pays.

Logiquement, l’optimum économique était atteint quand les pays de l’actuelle zone euro disposaient chacun de leur propre monnaie fluctuant dans le système international de changes libres.
Comme les monnaies nationales des pays de l’€-système ont disparu, ce sont les rendements des bons des Trésors qui jouent le rôle d’ersatz de ces monnaies car ce sont les actifs les plus liquides, ce qui est bien connu de tout monétariste.

Leurs écarts relatifs (c’est-à-dire en pourcentage par rapport au Bund de référence) donnent l’ordre de grandeur de la dévaluation potentielle de ces monnaies par rapport au deutsche mark dans le cas de l’éclatement de l’€-système.

Si les Marioles de la BCE rachètent en masse des bons de Trésors de certains pays (parce qu’ils estiment que leurs rendements sont trop élevés par rapport à ceux du Bund), ils modifieront alors ce qui mesure ces écarts de productivité sans les diminuer.

Ils agiront comme des charlatans se faisant passer pour des médecins modifiant la graduation du thermomètre pour faire croire que le patient n’a plus de fièvre.

En rachetant des quantités illimitées de mauvais bons de Trésors, la BCE ne créera pas directement de la monnaie mais elle prolongera artificiellement les déséquilibres en faisant disparaitre leur mesure, ce qui ne fera que différer les échéances inéluctables.

Les cochons de pays du Club Med pourront continuer à bénéficier des transferts de la Buba en toute impunité, c’est-à-dire en laissant perdurer les déficits de leurs balances commerciales et la création monétaire qui s’accompagne et qui a déjà abouti à cette hypertrophie de 3 500 milliards d’euros en M1.

Le bilan de la Fed montre clairement (et il en sera de même pour la BCE) qu’elle ne crée pas de monnaie en rachetant des bons du Trésor : elle ne fait que contribuer à faire circuler de l’argent, ce qui est de son ressort.

En effet, les banques américaines ont déposé plus de 1 500 milliards de dollars de disponibilités auprès de la Fed

Document 1 :

qu’elle utilise en rachetant des bons du Trésor,

Document 2 :

Autre formulation : la Fed rachète aux banques américaines des bons du Trésor, ce qui leur procure des disponibilités qu’elles placent à la Fed.

Il ne faut pas confondre création et circulation monétaire.

C’est simple, tout est simple, mais encore beaucoup trop compliqué pour que les innombrables idiots inutiles comprennent ces problèmes monétaristes élémentaires.

Cliquer ici pour voir le dernier bilan de la Fed d’où sont tirés ces documents.

12 réflexions sur “BCE, Fed, bons et idiots…”

  1. Merci de vos explications, c’est tellement clair effectivement…
    Question subsidiaire: Sauf contrat entre la Fed et les banques? Qu’est-ce qui empêche les banques de récupérer leurs disponibilités pour les placer ailleurs qu’à la Fed? Cela ne deviendrait-il pas immédiatement de la création monétaire? A moins que les banques ne doivent attendre l’échéance des obligations correspondantes pour récupérer ces mêmes disponibilités?

  2. Le fait que les pays du Sud viennent se servir à la buba via TARGET2 n’est en rien un bénéfice indu; ce n’est que la contrepartie des excédents commerciaux de l’Allemagne; excédents uniquement permis par la manipulation monétaire due à l’abandon des changes flottants.

    L’Allemagne n’aurait jamais eu ces excédents commerciaux; sans le change fixe appelé « Euro ».

    Rappelons qu’entre 95 et 98 :

    – la balance commerciale allemande était déficitaire
    – la balance commerciale grecque était loin d’être catastrophique (légèrement négative)
    – la balance commerciale italienne positive
    – la balance commerciale espagnole très légèrement négative

    Depuis l’entrée en vigueur de l’€ :

    Effondrement des balances commerciales du sud; excédents commerciaux phénoménaux du nord. Nul doute que si l’€-zone implose et que les changes flottants sont restaurés; l’économie Allemande va passer un sale quart d’heure; qui ne durera pas un quart d’heure mais plusieurs années

    1. @ surya : votre exemple est très clair. La France était aussi excédentaire jusqu’en 2004…

      Avec des monnaies plus faibles et des changes flottants, il était plus « facile » de financer son déficit. Les autochtones souffraient d’une monnaie faible à l’international, mais le marché national restait soutenu.

      Ce qui a « tué » l’euro n’est pas tant son cadre strict que l’aveuglement des dirigeants euro-zonards à se surendetter et faire croire à leurs compatriotes qu’ils étaient aussi riches que l’Allemagne et l’Europe du Nord en général.

      Par exemple, au Portugal, les autoroutes sont gratuites ! Encore aujourd’hui, en dépit de déficits de ressources pour le gouvernement!
      Les taxes foncières sont ultra-faibles : 250 € / an pour des constructions de 200m² sur des terrains de plus de 1000m² ! Elles ont néanmoins le mérite d’exister, tout comme le cadastre….
      En France, on est habitué à des taxations tous azimuts. Dans ces pays-là, le niveau de prélèvement reste relativement bas. Les surtaxer tuerait la croissance mais les caisses sont vides et il n’y a pas de création d’emplois ! (en dépit d’un SMIC à 490 € / mois…). L’industrie reste atone…
      La sortie de l’euro serait salutaire sur l’aspect croissance, mais rembourser en escudos, drachmes, pesetas ou lires le nominal de la dette libellé en euro de 2012 va prendre des…. dizaines d’années je le crains…

      1. @Julien
        Une nuance à apporter à vos propos. Les remboursements se font dans la monnaie souveraine de l’Etat. A l’heure actuelle c’est l’euro, mais demain… dans la nouvelle devise des pays concernés.
        Nouvelle devise qui se verra instantanément dévaluée et donc beaucoup plus facile à rembourser du fait du retour de la compétitivité.

      2. Oui, mais le récession n’est pas une conséquence de la dette. C’est la dette qui est une conséquence de la récession, entre autres.

        D’autre part, une dévaluation (sortie de l’euro ou dévaluation de l’euro) n’entraînerait-elle pas systématiquement une dévaluation de la dette de même ratio?

        Bon après-midi!

  3. Bonjour,
    A propos de la FED…
    Vous tenez tout de même un discourt contraire à Charles Gave, ce qui est étonnant..

    http://institutdeslibertes.org/2012/09/04/les-apprentis-sorciers-petite-analyse-logique-du-discours-de-monsieur-bernanke/
    « Toute la première partie du discours consiste à affirmer que les précédents QE (=quantitative Easing, c’est-à-dire achats d’obligations à l’émission par la banque centrale US, financés par la planche à billets) n’ont eu aucune influence négative sur l’économie US, qu’il n’y a eu ni inflation ni « mal-investissement » comme le craignaient les détracteurs de cette politique « 

  4. M. Chevallier, vous dites: « Le bilan de la Fed montre clairement (et il en sera de même pour la BCE) qu’elle ne crée pas de monnaie en rachetant des bons du Trésor : elle ne fait que contribuer à faire circuler de l’argent, ce qui est de son ressort. »

    Une chose me chiffonne tout de même en ce qui concerne la BCE:
    Dans le système de rachat de dettes de la BCE. Même si à proprement parler celle-ci ne créée pas de monnaie, par « stérilisation », il n’empêche que les obligations d’état (espagnole, italienne,..) qu’elles rachètent sur le marché secondaire auprès des banques se feront quasiment au pair (du fait même de l’effet d’annonce de rachat par la BCE), et non au prix du marché véritable. Les banques ne vont donc pas enregistrer leurs pertes, comme tout mauvais spéculateur qui se serait planté.
    Ce qui veut dire pour reprendre votre expression que c’est de l’argent « non gagné » qui est reversé aux banques, car cet argent n’est adossé à aucune amélioration de compétitivité de ces mêmes pays susceptibles de justifier un tel prix de rachat.
    Selon vous ces montant ne vont-ils pas venir grossir l’hypertrophie de nos agrégats de la zone euro?

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