L’ISDA a publié les réponses à deux premières questions concernant la dette grecque et elle considère qu’il n’y a pas de défaut de paiement, ce qui infirmerait a priori mon analyse, pour l’instant du moins.
Document 1 :
En fait, le comité de l’ISDA compétent en la matière n’était pas interrogé sur la question que je posais, mais sur d’autres.
Mon argumentation est la suivante : à partir du moment où des détenteurs de bons du Trésor grec sont obligés d’accepter une perte (importante), il y a indubitablement défaut de paiement, ce qui sera vrai lorsque les clauses d’action collective seront activées après l’apport des deux tiers des titres à la restructuration de la dette grecque.
Pour l’instant, une telle question n’a pas été posée. Elle le sera de toute évidence prochainement.
De toute façon, l’Etat grec est et sera incapable de payer ses dettes, ce qui signifie qu’il est ou qu’il sera en défaut de paiement tôt ou tard. Le maintien de la Grèce dans l’euro système est contraire à toute logique économique élémentaire.
La première question posée concernait le traitement privilégié dont a bénéficié la BCE par rapport aux détenteurs privés de mauvais bons du Trésor grec. Le comité de l’ISDA a considéré qu’il n’entrait pas dans le cadre d’un défaut de paiement, sans donner de justification.
Il y a là pourtant une discrimination entre créanciers qui conduit à en léser certains et à en favoriser d’autres, comme l’ont fait remarquer des dirigeants de grandes banques comme celui de Commerzbank.
Normalement, le débiteur doit rembourser les sommes dues à l’échéance sans aucune autre considération, sinon, c’est un défaut de paiement, partiel ou entier, peu importe.
Cette première décision est donc contestable.
La seconde question portait sur l’accord entre des créanciers et l’Etat grec qui aboutit à ce que les créanciers acceptent volontairement de perdre globalement 206 milliards d’euros ! … tout en récupérant quand même le quart de leurs investissements. En fait, s’ils ont accepté cet accord, c’est parce que sans lui, ils n’auraient rien récupéré du tout ! … ce qui aurait conduit indubitablement à un défaut total de paiement de la Grèce.
Cette seconde décision est elle aussi contestable.
Ces décisions ont été prises par les représentants… d’établissements financiers dont certains ont bénéficié de cet accord…
Document 2 :
… qui agissent comme les mécanos de la Générale et ceux de BNP en France où ce sont eux qui font les lois et les règlements et qui les appliquent en fonction de leurs intérêts, comme le montre leur traitement des titres subordonnés.
Normalement, en tant qu’ersatz de bourse de CDS, l’ISDA aurait dû prendre des décisions sur la dette grecque, soit en considération d’une argumentation juridique, économique et financière solide, fiable, soit en intégrant les représentants des différentes parties concernées.
Pour l’instant, ce qui était inenvisageable est bien réel : l’ISDA a pris deux décisions qui ne donnent pas une image fidèle et fiable de la réalité en défendant les seuls intérêts de ses décideurs que sont des big banks too big to fail.
Ce bon vieux Greenspan a toujours défendu les prérogatives de la Fed dont les dirigeants doivent défendre d’abord et avant tout les intérêts de l’Amérique (c’est-à-dire des Etats-Unis), en toute indépendance, quelles que soient les pressions exercées par des parties influentes, partis politiques, syndicats, big banks, grandes entreprises, groupes de pression, etc.
Ce n’est pas le cas de l’ISDA ni des marchés des CDS et c’est un gros problème qui n’est pas résolu correctement.
Le capitalisme libéral ne consiste pas à laisser faire n’importe quoi par n’importe qui n’importe comment. Il doit impérativement instituer et faire respecter rigoureusement des règles qui permettent aux acteurs de jouer librement dans ce cadre pour assurer la richesse des nations.
Le bombardier furtif B-2, Ben Bernanke, attend peut-être que d’autres grandes turbulences créées par ces marchés non régulés aboutissent à un grand choc pour imposer un ordre nécessaire.
Cliquer ici pour voir les pages de l’ISDA d’où sont tirés les documents ci-dessus.
Le jour même ou Pimco vote non au defaut à l ‘Isda, son patron déclare que c’est un dangereux précédent:
http://www.reuters.com/article/2012/03/01/greece-bonds-pimco-idUSL2E8E14VV20120301
Si vous prenez ces gens au serieux, tant pis pour vous.
J’ai déjà eu l’occasion de relever les incohérences (apparentes) de la gestion de Pimco !
The EMEA DC noted, however, that the situation in the Hellenic Republic is still evolving and today’s EMEA DC decisions do not affect the right or ability of market participants to submit further questions to the EMEA DC relating to the Hellenic Republic nor is it an expression of the EMEA DC’s view as to whether a Credit Event could occur at a later date, in each case, as further facts come to light.
http://www2.isda.org/news/isda-emea-determinations-committee-credit-event-has-not-occurred-with-respect-to-recent-questions-on-the-hellenic-republic-restructuring
Jeudi 1er mars 2012 :
Affaire Madoff : vers une mise en examen de BNP Paribas.
Selon de très bonnes sources, une mise en examen de BNP Paribas dans l’affaire Madoff est désormais plus que probable. Un arrêt du 30 janvier de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, dont Mediapart a eu connaissance, est à l’origine de ce rebondissement.
« La responsabilité de Bernard Madoff n’exclut pas l’hypothèse d’un comportement frauduleux des intermédiaires comme la BNP », dit cet arrêt. Celui-ci valide implicitement la plainte du liquidateur américain des sociétés Madoff, selon lequel la banque BNP a profité d’un «enrichissement injuste ».
http://www.mediapart.fr/journal/economie/290212/madoff-vers-une-mise-en-examen-de-bnp-paribas
Personnellement, je m’inquiète pour nos démocraties. Ce vote de l’ISDA est un excellent exemple de cette mouvance extrêmement dangereuse à laquelle on assiste depuis quelques année, ce glissement de la démocratie vers une sorte de mélange d’oligarchie, de ploutocratie et de technocratie. Sans tomber dans le populisme, je me demande si nous ne sommes pas la grenouille que l’on essaie de cuire.
Vous ne connaissez pas l’histoire de la grenouille que l’on essaie de cuire? Si vous faites bouillir votre eau et jetez la grenouille dedans, elle aura mal, et donnera un coup de patte pour sortir de l’eau. Au contraire, si vous la trempez dans de l’eau froide, elle ne sortira pas. Faites gentiment (j’insiste, gentiment) chauffer l’eau, elle s’y sentira bien. Continuez à chauffer gentiment… elle va se sentir assommée, mais n’aura pas l’énergie de se sortir de là. Elle va cuire sans autre forme de procès et sera délicieuse à béqueter.
Bien entendu, aucune allusion à aucune situation existante ou ayant pu exister n’est fortuite…
En Espagne, la grenouille se rebiffe! Les images de violences font peur. Jusqu’où cela va-t-il nous pousser?
Bonne nuit et profitons bien de ce joli printemps.
Les CDS sont des contrats privés entre entités privés. J’ose espérer que les Etats ne vont pas venir tripatouiller tout cela avec leur gros doigts boudinés.
La démocratie, c’est le peuple qui délègue le pouvoir, pas l’Etat qui fourre son nez partout sans opposition, ce qui est le totalitarisme. Je le rappelle pour ceux qui l’aurait oublié.
Oui, mais là, le peuple n’y est pas : il n’y a que des banksters ! et ils sont dangereux.
Je ne comprends pas comment vous pouvez écrire « Ces décisions ont été prises par les représentants… d’établissements financiers dont certains ont bénéficié de cet accord… » et imaginer que l’ISDA puisse finir par prendre une décision qui irait a l’encontre des intérêts des banksters… qui sont juges et parties. Si ces CDS ne sont pas déclenchés, leur cours devrait chuter. Comment ces CDS apparaissent-ils dans les bilans des banques ?
Bonjour,
Dans un pays sclérosé par l’idéologie socialiste (et qui sombre de ce fait), il est quand même extraordinaire que cette décision, que d’aucuns juristes pourraient qualifier de forfaiture, ne fassent pas l’objet d’une dénonciation vigoureuse par ceux-là même qui dénigrent le système de capitalisme de connivence qui prévaut au niveau européen, voire mondial.
La fable de la grenouille, si justement rapportée par Joël, s’applique parfaitement à notre société. L’eau qui chauffe y prend des aspects décidément surprenants.
Bonne journée
Wikipedia est assez intéressante, une fois de plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Credit_default_swap
A priori, les CDS seraient comptabilisés hors bilan.
Oui, évidemment puisqu’ils ne donnent pas lieu à un paiement lors de l’établissement du contrat. Seules sont comptabilisables les transactions effectivement effectuées.
Oui, mais utilisent-ils ces CDS pour pondérer leurs risques dans leurs calculs de comptabilité ?
Dans ce cas là, bien que hors bilan, ces CDS vont apparaître indirectement dans la valorisation d’autres partie du bilan. Si les CDS ne sont pas activables, les risques minimisés car couverts par des CDS ne sont plus comptabilisés à leur juste valeur.
Un article qui évoque ce type d’utilisation des CDS pour maquiller les bilans mais évoque en plus une escroquerie supplémentaire possible des bilans en les utilisant …
http://www.objectifeco.com/economie/economie-politique/article/vincent-benard-non-paiement-des-cds-sur-la-dette-grecque-entourloupe-simple-ou-scandale-a-tiroirs
L’ISDA n’allait quand même pas ce mettre à dos toutes la communauté Européenne,il faut être un peu logique.
Le système est tellement fragile qu’il ne faut surtout pas faire de vagues, c’est bon pour personne. Donc de ce côté il ne va rien se passer.
Il n’y aura pas de vagues mais un tsunami !!!
Il commence à se faire attendre !
C’est la dernière carte qu’a Sarkosy pour sa réélection.
L’ISDA apparait bien comme un assureur : toute personne qui a eu maille à partir avec un assureur sait qu’il est quelques fois bien difficile de se faire payer… 😉
Sans doute qu’il y a plus de 3,5 milliards d’euros dans la balance, non ?
Bonsoir,
Le point de vue de Vincent Bénard: http://www.objectifeco.com/economie/economie-politique/article/vincent-benard-non-paiement-des-cds-sur-la-dette-grecque-entourloupe-simple-ou-scandale-a-tiroirs
Un extrait: « Difficile d’y voir clair, et je ne me hasarderai à aucune prévision. Dans cette crise, la seule chose qui est certaine, c’est que le droit contractuel classique et le règne de l’état de droit ne valent plus grand chose quand de puissants intérêts acoquinés aux états règnent en maîtres. Et malheureusement, dans ce monde où tordre les lois devient la base des affaires, les grilles de lecture traditionnelles de l’économie sont mises à mal. Tout sera fait pour sauver les grandes banques internationales, monétisation, déni de droit… Mais à force de tirer sur les cordes qui tenaient jusqu’alors l’économie, elles pourraient finir par casser. »