L’hypertrophie de l’agrégat monétaire M2 aux États-Unis est considérable : plus de 5 000 milliards de dollars d’argent non gagné se trouve encore indument dans les comptes des Américains… C’est ingérable et létal !
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Pour premier rappel, l’argent sain est le premier pilier des Reaganomics, dixit Arthur, Laffer, ce qui signifie que les ratios des agrégats monétaires par rapport au PIB annuel courant (en pourcentage) ne doivent pas dépasser certaines limites qui sont tirées de l’observation de leur évolution depuis l’après-guerre pour les États-Unis,
Document 1 :
Pour deuxième rappel, l’agrégat M1 correspond à la somme, d’une part des billets en circulation qui sont censés se trouver dans les portefeuilles de la population qui vit aux États-Unis et d’autre part du total des soldes positifs des comptes courants de ces Américains.
M1 doit être de l’ordre de 15 % du PIB annuel courant.
L’agrégat M2-M1 représente le total des dépôts de la population des États-Unis dans des comptes d’épargne rémunérés pouvant être débités sans préavis.
M2-M1 doit fluctuer aux alentours de 40 % de ce PIB.
L’agrégat M3-M2 est constitué par le total des trésoreries des entreprises établies aux États-Unis.
M3-M2 ne doit pas dépasser 25 % de ce PIB.
En effet, quand ces ratios dépassent ces limites dans une nation, il s’y crée alors une bulle monétaire qui provoque toujours de graves dysfonctionnements.
Il est donc impératif que ces ratios soient scrupuleusement surveillés et que les autorités monétaires de cette nation agissent au plus vite pour faire éclater toute bulle monétaire en gestation car, en agissant trop tard, les dommages collatéraux seraient alors létaux.
Les autorités américaines (principalement la Fed) ont toujours fait respecter cette règle, plus ou moins rapidement en créant toujours une récession plus ou moins grave mais finalement salvatrice.
Or, tout a basculé depuis le début de cette histoire de coronavirus lorsque les autorités des États-Unis ont décidé de distribuer des milliers de milliards de dollars à des Américains auxquels ils interdisaient en même temps de travailler, ce qui est contraire à toute logique économique la plus élémentaire !
Document 2 :
Depuis que les données de la Fed sur ces agrégats monétaires sont publiées sur la base des mêmes définitions (depuis 1959), jamais une telle hypertrophie monétaire ne s’est produite aux États-Unis car ses dirigeants sont toujours intervenus pour faire éclater toute bulle monétaire qui s’y développait.
Le graphique représentant l’évolution de l’agrégat M2 en dollars comparativement au PIB annuel en dollars courants met bien en évidence lui aussi cette bulle monétaire en M2 : le ratio de l’agrégat monétaire M2 par rapport au PIB annuel courant (en pourcentage) a explosé en 2022, après avoir commencé à dépasser les limites normales à partir du mois de juillet 2011,
Document 3 :
Le gros problème qui devrait se poser maintenant aux autorités américaines est de faire éclater cette énorme bulle monétaire !
D’après les déclarations de Jerome Powell et d’autres anciens et actuels membres du FOMC, la mesure qui permettait auparavant de faire éclater une bulle monétaire en gestation était (relativement) simple : il suffisait d’augmenter le taux de base de la Fed au point de créer une inversion de la courbe des taux, ce qui provoquait immanquablement une récession plus ou moins forte mais suffisante pour rétablir les bons ratios.
Or cette solution ne fonctionne plus maintenant car cette bulle monétaire est trop forte !
En effet, la baisse du montant de l’agrégat M2 n’est que de… 758,9 milliards de dollars fin mai dernier par rapport à un plus haut atteint en avril 2022 à… 21 722 milliards de dollars, soit 3,5 % de baisse seulement, ce qui est négligeable par rapport à la norme.
Document 4 :
Normalement, le montant de l’agrégat monétaire M2 aurait dû rester proche de 55 % du PIB courant annuel (qui est de 28 284,5 milliards de dollars), soit de 15 720 milliards de dollars alors qu’il est de 20 963 milliards de dollars.
Il y a donc 5 244 milliards de dollars en trop dans les comptes de certains Américains, ce qui constitue une bulle monétaire gigantesque.
Ces Américains ont donc encore beaucoup trop d’argent disponible sur leurs comptes bancaires et ils en profitent pour le dépenser en partie, ce qui alimente la demande et donc l’offre.
Dans ces conditions, il est compréhensible que l’inflation soit toujours hors normes et que l’économie américaine fonctionne encore à plein régime avec des créations d’emplois très nombreuses et un taux de chômage historiquement très bas.
Jerome Powell et les membres du FOMC devraient donc être obligés de constater que la hausse historiquement très rapide et très forte du taux de base de la Fed n’a aucun effet positif contre cette inflation hors normes et qu’elle ne crée pas de récession, du moins pour le moment mais c’est ce qui viendra dans un avenir proche !
Ils ne savent donc pas quoi faire pour faire baisser l’inflation (et l’activité économique) et il n’y a pas a priori de solution imaginable pour faire éclater une telle bulle monétaire !
Les autorités américaines ont donc fait une erreur historique juste au mauvais moment, à savoir lorsqu’ils ont pris des sanctions contre la Russie le 27 février 2022 (en gelant, c’est-à-dire en volant plus de 300 milliards de dollars de réserves de la Russie), ce qui a eu pour conséquence que tous les dirigeants des grands pays exportateurs (et titulaires de réserves considérables en dollars) n’ont désormais plus confiance en l’Amérique ni dans le dollar (USD).
La force de ce dollar (USD), grâce entre autres au respect des ratios des agrégats monétaires avait pourtant permis à l’Amérique de conserver depuis l’après-guerre son leadership sur le monde libre, ce qui ne sera plus le cas à l’avenir.
L’argent sain est bien le premier pilier des Reaganomics !
Cependant, ces interprétations peuvent ne pas correspondre à la réalité…
En effet, il n’est pas crédible que les dirigeants de la Fed n’aient pas pu admettre qu’une inflation forte et durable s’était développée dès la fin de l’année 2020 comme le montrent pourtant clairement les indices PCE, cf. mes articles à ce sujet.
Dès lors, il faut envisager une autre solution : les dirigeants de la Fed ont voulu créer une crise systémique américaine mais aussi mondiale s’inscrivant dans le cadre de ces manipulations d’opinions publiques menées par ceux qui sont actuellement réellement au pouvoir aux États-Unis…
Autre interprétation possible : les partisans de la Théorie Monétaire Moderne (MMT) peuvent avoir convaincu les membres du FOMC que distribuer de l’argent non gagné permettait de doper la croissance, le reste du monde continuant à financer automatiquement les déficits des balances extérieures par des apports de capitaux…
En effet, il n’y a eu plus qu’un seul article qui a été publié sur cette MMT (Théorie Monétaire Moderne) cette année 2024, et il l’a été en… Australie (!) à l’occasion de conférences données par Stephanie Kelton qui est connue comme une fervente partisane de cette MMT et de… Bernie Sanders !
Cliquer ici pour le lire.
Le silence médiatique actuel des partisans de la MMT après une abondance d’articles publiées depuis des années, jusqu’en 2022, est peut-être un bon révélateur de l’échec de cette théorie.
Plus personne n’y comprend plus rien au sujet de ces problèmes économiques, financiers, bancaires, monétaires, surtout à cause de la volonté de la plupart des intervenants de ne plus se baser sur les fondamentaux du monétarisme.
Même Jamie Dimon avoue son incompétence comme le montrent ses dernières déclarations…
Document 5 :
Aujourd’hui, les déficits sont encore plus importants et se produisent en période de prospérité – et non à la suite d’une récession – et ils ont été soutenus par un assouplissement quantitatif, ce qui n’avait jamais été fait avant la grande crise financière.
L’assouplissement quantitatif est une forme d’augmentation de la masse monétaire (bien qu’il ait de nombreuses contreparties). Je reste plus préoccupé par l’assouplissement quantitatif que la plupart des gens, et par son renversement, qui n’a jamais été fait à cette échelle.
Document 6 :
« Lorsque des événements terribles se produisent, nous avons tendance à surestimer l’effet qu’ils auront sur l’économie mondiale.
Les événements récents, cependant, pourraient bien créer des risques qui pourraient éclipser tout ce qui s’est passé depuis la Seconde Guerre mondiale – nous ne devrions pas les prendre à la légère ».
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Par ailleurs, les seules variations d’une année sur l’autre de l’agrégat monétaire M2 mettent bien en évidence l’émergence de cette bulle monétaire historique mais la baisse en territoire négatif conduit à des erreurs d’interprétation car la bulle monétaire n’a pas éclaté pour autant !
En variation d’une année sur l’autre, M2 est revenu en territoire positif depuis le mois d’avril,
Document 7 :
L’augmentation des billets en circulation après 2020 est importante mais elle n’est pas catastrophique.
En effet, l’hypertrophie de la masse monétaire ne provient pas de l’usage intempestif de la fameuse planche à billets mais de la distribution de 5 000 milliards de dollars sous la forme de virements bancaires versés à beaucoup d’Américains et à certaines de leurs entreprises.
Document 8 :
La part de ces billets en circulation par rapport au PIB est marginale. Elle est revenue dans les normes.
Document 9 :
Cliquer ici pour (re)lire mon article précédent à ce sujet.
Cliquer ici pour (re)lire mon article de base sur la masse monétaire libre.
Cliquer ici pour lire l’article de ZeroHedge sur les déclarations de Jamie Dimon
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