Monétarisme, principes comptables et banksters

Une petite réflexion sur les principes comptables appliqués par les banksters a une grande importance en analyse fondamentale et au niveau monétariste, donc sur la richesse des nations et de leurs habitants…

Selon les principes comptables actuellement en vigueur, les actifs doivent être comptabilisés à leur juste valeur (fair value) du marché pour donner une image fidèle de la réalité de toute entreprise.
Toute perte de valeur de ces actifs doit être dépréciée dès qu’elle est décelable.

La décision d’appliquer ce principe comptable a été prise lors de la crise dite d’internet au début des années 2000.
A cette époque-là, les entreprises achetaient des dot.com à des prix considérablement surévalués. Après avoir constaté que la plupart d’entre elles ne valaient plus rien ou pas grand-chose, les dirigeants pouvaient diminuer l’impact immédiat de leurs pertes en les amortissant sur 20 ans.
C’est ce dysfonctionnement qui a expliqué principalement le gonflement de la bulle internet.
Redevenues en position de force, les autorités américaines, menées par ce bon vieux Greenspan, ont pu imposer de nouvelles règles qui obligeaient les entreprises à comptabiliser sans délai la totalité de leurs pertes dès qu’elles sont décelables, ce qui a fait ainsi apparaitre clairement les conséquences des erreurs des dirigeants imprudents qui ont renoncé par la suite à de tels investissements.
L’adoption de cette règle comptable a donc fait éclater cette bulle internet.

Actuellement, et principalement dans la zone euro, un autre dysfonctionnement comptable (du même type que celui de la bulle internet) explique le développement d’une autre bulle monétaire, considérable, située principalement dans l’agrégat M1 : la non-dépréciation immédiate des prêts dits non performants (Non Performing Loans, NPL), ou créances douteuses des banksters, comme je l’ai déjà écrit précédemment sur la base de l’analyse de l’évolution de la masse monétaire.

L’analyse des résultats de la banque Intesa Sanpaolo permet de mettre en évidence ce problème macro-économique au niveau micro-économique…

En effet, ces créances dites douteuses devraient être comptabilisés à leur juste valeur du marché à l’actif, donc en tant que pertes au passif (en diminution du montant des capitaux propres).

Les bankters d’Intesa Sanpaolo évaluent ces prêts dits non performants à 25,464 milliards d’euros fin 2017,

Document 1 :

En admettant que leur évaluation soit juste, et que ce chiffre corresponde effectivement aux pertes potentielles compte tenu d’une possible sous-évaluation due entre autres à des aléas, cette somme doit venir en diminution du montant des capitaux propres auxquels il faudrait aussi retirer les 3,5 milliards d’euros que le gouvernement italien a donnés en violation de toutes les règles en vigueur !

Dès lors, il est possible de déterminer le véritable montant des capitaux propres en respectant les principes comptables en vigueur basés sur l’évaluation des actifs à leur juste valeur, colonne 2017 efv,

Document 2 :

Intesa Sanpaolo201620172017 e2017 efv2017 e n
1 Assets725,1796,9796,9796,9183,2
2 Equity48,956,156,156,156,1
3 Deductions--6,56,56,5
4 Goodwill-444
5 Tangible eq48,91156,12145,62116,65716,657
6 Liabilities676,227740,74751,24780,204166,57
7 Leverage (µ)13,813,216,546,810
8 Core Tier 1 (%)7,27,66,12,110

Le résultat est clair : le véritable multiple d’endettement d’Intesa Sanpaolo fait un bond à 46,8 !
Pour rappel, la banque des frères Lehman a été mise en faillite à cause d’un leverage de 32

Normalement, c’est-à-dire d’après la norme préconisée par ce bon vieux Greenspan, le total des dettes s’une banque ne doit pas dépasser 10 fois le montant de ses capitaux propres.
En appliquant cette règle prudentielle d’endettement, le total des actifs d’Intesa Sanpaolo devrait être de 183,2 milliards d’euros, colonne notée 2017 e n.
614 milliards d’euros ont donc été prêtés à tort par cette banque, ce qui alimente la création monétaire que j’ai mise en évidence par ailleurs.

Conclusion : la zone euro est donc bien proche d’un €-crash à cause de ses banksters qui ne respectent pas les règles prudentielles d’endettement ni les principes comptables qui devraient être en vigueur.
Comme ils exercent une influence dominante sur les autorités qui devraient les réguler, ils ont réussi à obtenir que les principes comptables ne soient pas transcrits en règles impératives pour ce qui concerne leurs créances dites douteuses qui sont en fait des pertes certaines à venir.

Le village Potemkine qu’est le système bancaire de la zone euro donne l’impression de fonctionner presque normalement alors qu’il est au bord d’un crash monumental.
Tout le monde est content.

Evidemment, les Américains, c’est-à-dire les investisseurs influents, les bons spéculateurs, les autorités et autres connaissent bien cette situation.
Ainsi s’expliquent les variations des marchés financiers qui donnent l’impression d’être irrationnelles pour les innombrables idiots inutiles…
Tout est simple.

11 réflexions sur “Monétarisme, principes comptables et banksters”

  1. Selon vous, ces prêts non-performants sont-ils directement liés à l’adoption de cette monnaie unique contre nature qu’est l’€? Les €-zonards des cochons de pays du club med n’arrivent plus a s’en sortir comme avant?
    Ou bien ces non-performing loans sont la depuis bien longtemps?

  2. Bonjour M. CHEVALLIER,
    Vous ecriviez le 7 février: « Par ailleurs, il est étonnant de constater que les Marioles de la BCE n’ont acquis que pour 30 milliards d’euros de titres depuis le 15 décembre ». En plus des autres..
    Suite à cet article, les titres sont-ils considérés à leur juste valeur ? Qui en défini la valeur, le marché je suppose, qui alors vérifie si la valeur est bien celle du marché.?
    La BCE ayant déjà fait le même coup avec l’or qui n’était pas valorié à sa juste valeur suite à sa dégringolade il y a quelques années. (perte de 15 M€).

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