L’ingénieur VW en Grèce et ses billets : petites leçons de monétarisme pour les nuls

Les petites histoires simplifiées conçues pour expliquer des problèmes économiques complexes sont généralement maladroites et peu utiles mais celle qui m’a été proposée récemment se révèle finalement très intéressante car elle facilite la compréhension de certains aspects du monétarisme quand on la transpose dans ce qui s’est passé ces dernières années dans certains pays…

Des dysfonctionnements peuvent toujours se produire dans tout système économique national basé sur la liberté lorsque des règles ne sont pas respectées ou lorsque les règles nécessaires (au bon fonctionnement du système) ne sont pas adoptées.
Ainsi en est-il d’un possible surendettement généralisé qui peut se produire quand les règles prudentielles d’endettement ne sont pas respectées, ce qui est le cas dans l’histoire de l’ingénieur VW en Grèce.

Comment résoudre de tels problèmes ?
Si les autorités compétentes… le sont (compétentes !), des solutions a priori paradoxales (pour les personnes qui n’ont pas assimilé les bases de la culture monétariste) mais logiques peuvent faire repartir la croissance sur de bons fondamentaux.
Dans le cas contraire, les remèdes ne peuvent qu’aggraver la situation…

Dans l’histoire de l’ingénieur VW en Grèce, tout était bloqué car il n’y avait plus d’argent en circulation.
L’introduction temporaire d’une certaine somme d’argent dans le système a permis à tous les agents de régler leurs dettes.
En effet, à partir du moment où les billets circulent, toute l’activité économique peut reprendre… si les fondamentaux sont rétablis, c’est-à-dire si les agents respectent les règles prudentielles d’endettement (ou si les autorités les font respecter !).
L’introduction temporaire d’une certaine somme d’argent dans le système n’est pas de la création monétaire puisqu’elle est retirée dès que la circulation monétaire a repris.

C’est ce mécanisme monétariste qui a été appliqué par les autorités américaines lorsque les règles prudentielles d’endettement n’ont plus été respectées par les big banks to big to fail au début des années 2000 : elles ont introduit en 2008 des centaines de milliards de dollars dans des établissements financiers pour que le système bancaire ne soit pas bloqué, ce qui a facilité la circulation monétaire et c’est ce qui a fait repartir la croissance, en flinguant au passage pour l’exemple la banque des frères Lehman histoire de montrer que d’autres pourraient suivre au cas où elles ne respecteraient pas ces règles (un multiple d’endettement de l’ordre de 10 d’après ce bon vieux Greenspan).
Les centaines de milliards de dollars introduits dans des établissements financiers par les autorités américaines ont finalement été remboursés. Le QE a contribué à accélérer la circulation monétaire sur des fondamentaux rétablis.
Tout est simple, et efficace mais un peu paradoxal pour les gens qui confondent circulation monétaire et création monétaire.

Quid dans la zone euro ?
La situation est différente de ce qui s’est passé aux Etats-Unis sur trois points principalement…

D’abord, les autorités monétaires ne font pas respecter les règles prudentielles d’endettement bancaire. De ce fait, les fondamentaux ne sont pas rétablis. En particulier, le marché interbancaire est encore et toujours bloqué car les dirigeants des grandes banques qui sont bien placés pour connaitre leurs difficultés, n’ont plus confiance entre eux.
La circulation monétaire est donc bloquée. L’argent ne circule pas normalement, surtout entre les banques.
Les centaines de milliards d’euros généreusement prêtés par la BCE aux banques y reviennent en dépôt sans exercer le moindre effet d’entrainement dans le système économique qui fonctionne mal, au ralenti, en crise larvée, surtout en France où les Gos banques sont loin de respecter un multiple d’endettement de l’ordre de 10.

Ensuite, l’argent n’est pas sain dans la zone euro du fait qu’il y a une hypertrophie de la masse monétaire dans l’agrégat M1 qui représente plus de 50 % du PIB annuel contre 17 % aux Etats-Unis.
L’introduction de centaines de milliards d’euros par la BCE (dans son QE) et l’augmentation des dépenses publiques (surtout sous la forme d’aides dites sociales) et des déficits publics ne font qu’augmenter cette hypertrophie monétaire, et donc ralentir la croissance.

Enfin, l’euro est une aberration, une monnaie contre nature car elle n’est pas celle d’une nation mais de nations indépendantes et souveraines dont les niveaux et les gains de productivité sont hétérogènes.
De ce fait, les fondamentaux ne sont pas respectés
.
Des pays comme la Grèce ne peuvent pas être sauvés par l’introduction de centaines de milliards d’euros qui ne font qu’accentuer en réalité les difficultés en augmentant la masse monétaire… bien que l’argent ne circule pas !

Les personnes qui ont lu ce que j’ai publié depuis un certain nombre d’années ont pu suivre en direct ces péripéties monétaristes et acquérir une certaine culture qui permet de comprendre ce qui se passe dans nos économies fortement financiarisées.
Un de mes lecteurs a trouvé très rapidement les bonnes solutions aux problèmes posés, bravo ! cf. les commentaires de la devinette.

21 réflexions sur “L’ingénieur VW en Grèce et ses billets : petites leçons de monétarisme pour les nuls”

  1. Bonjour,

    Dans votre exemple (l’histoire de l’ingénieur VW en Grèce), tout le monde est endetté avec tout le monde…. Est-ce que plus simple ne serait pas d’annuler leurs dettes ?

        1. Les dettes ne peuvent plus être remboursées, et d’ailleurs, il ne faut pas qu’elles soient remboursées afin de permettre à la finance de continuer à exercer son influence sur les politiques occidentaux totalement inféodés à celle-ci (« je n’ai qu’un ennemi c’est la finance » qu’il disait en campagne et quelques jours plus tard, devant un parterre de financiers à la City, ce même candidat indiquait que la finance ne devait rien avoir à craindre. Les deux informations n’avaient pas reçu le même accueil-relais médiatique. D’ailleurs, nommer un ex-Rothschild rejoint la concession de DE GAULLE lorsqu’il avait été obligé d’accepter celle de POMPIDOU également ex de cette même maison).

          Par contre, une stratégie pour encourager ce remboursement – pour ceux qui disposent du cash pour ce faire – serait en effet de mettre des taux directeurs négatifs (ce qui pour ma part me paraît tout à fait envisageable: couplé à la suppression des moyens de paiement liquides, on sera dans « Le meilleur des mondes »…). Ceux qui n’ont pas de cash par contre et qui veulent continuer à vivre – consommer – au-dessus de leurs moyens…

          Ou alors, on pourrait assister à un gigantesque Jubilé rejoignant une certaine Tradition, mais dans ce cas, on se retrouve dans une annulation de dettes et non un remboursement, et il y aurait une dimension quelque peu eschatologique…

  2. Chacun habitant américain dois déjà à sa naissance 58 000 dollars de dette par rapport au PIB et cette dette d’année en année ne fait que croitre, ses complètement utopique de croire qu’une seule nation remboursera sa dette et sur tous avec une croissance mondiale qui va de plus en plus mal

      1. La plupart des dettes ne seront jamais remboursées. Le système monde est déjà très endetté et les marchés lorsqu’ils se mettent à punir, punissent tout le monde en même temps. Si le monde se met à se désendetter on rentre dans une debt deflation infernale à la Irving Fisher. Imaginez-vous un instant que le Japon puisse un jour rembourser sa dette? Observez le chemin parcouru par notre pays la France en 20 ans et le gouffre qui le sépare du chemin qu’il aurait dû parcourir pour rétablir des finances saines? Il n’y a aucune chance que les bons fondamentaux ne soient jamais rétablis et les dettes par conséquent remboursées. « Ils » trouveront des palliatifs, l’arme monétaire de l’inflation, le « reset » cher à Bécassine, l’abandon de dettes, la sortie de l’euro et la dévaluation pour poursuivre la chienlit… Sur le long terme nous serons tous morts, un adage qui colle à la peau des politiciens de la plupart des pays du monde sauf peut-être en Suisse, en Allemagne bref des pays où la mentalité nationale est conforme aux prérequis du capitalisme libéral.

      2. encore un petit rappel avec des chiffres cette fois, dette publique Américaine par rapport au PIB, année 2003, 58.8 pc, année 2008 78.1 pc, année 2015, 111,4 pc et la création de richesse elle est ou ?, mais je vous rassure les autres nations ne fond pas mieux

  3. Au final chacun a remboursé ses dettes soit ! Toutefois l’économie réelle va caler car l’hôtelier grecque n’a rien gagné dans cette histoire et il va devoir vendre son hôtel… à l’Allemand.

    C’est effectivement ce qui se passe les bijoux grecs partent dans les poches de riches entreprises allemandes, chinoises and co… et pendant ce temps là le peuple grec s’appauvrit…

  4. Vous oubliez les produits dérivés,le bilan de la FED et la dette américaine!Ces trois éléments ont une incidence sur la santé des grandes banques et surtout de l’économie réelle!

  5. sur quelles bases dites vous M Chevallier, que le système monétaire interbancaire ne fonctionne plus ? c’est une vraie question, je ne trouve nulle part d’analyse sur ce sujet

    1. Le ballot qui débarque, en affirmant peremptoirement ne « trouver nulle part d’analyse sur ce sujet », alors que c’est l’analyse centrale du blog et des analyses… c’est drôle quand même.

      Hommage à la patience de l’auteur du blog. Il en faut.

  6. Merci à JPC pour ses analyses simples et limpides. En France cela va de mal en pis : Sup de co Amiens est en liquidation (tant mieux) ; malgré une direction de 25 ans par un ancien de l’audit anglo saxon, consul honoraire du UK. A part moi quel ancien de cette école lit ce blog ? Que penser du dirigeant de Platinum gestion Olivier Delamarche qui dit sur BFM Business que tout va mal aux USA et que les chiffres de son économie sont truqués. ?

  7. les banques qui ont des liquidités préfèrent les prêter à d’autres banques conte rémunération, plutôt que les laisser à la BCE à tx négatif..

  8. bonjour.les Banques centrales prêtent de l’argent aux banques,ces banques achètent des obligations d’état qu’elles mettent en dépot aux banques centrales.L’économie réelle n’est pas alimentée dans ce processus.merci

  9. Bonjour,

    Si un candidat à la présidence pouvait être élu en présentant une baisse de 20% de IS soit 13% au lieu de 33% et une déduction forfaitaire 30% sur IR au lieu de 10%. La méthode est simple et la roue commencera à tourner dans le bon sens.
    Les dettes se rembourseraient, les Rn augmenteraient, les investissements décolleraient, l’embauche exploseraient…..
    Et si en même temps il avait l’idée de trancher dans le vif des dépenses de l’états (suppression du miffefeuille, des organismes, loi inutiles, assistanat (cci, cice, loi pinel, isf, alignement statuts fonctionnaire….)

    Mais bon l’élection va une fois de plus se jouer sur la peur de l’autre, la justice, la race…

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