Stress tests : banksters et moi… émoi !

Vendredi 29 juillet 22 heures : c’est bien le meilleur moment pour publier les résultats des tests de stress des banques menés par l’EBA !
Il ne se passe jamais rien au mois d’août, c’est bien connu, mais c’est en août que sont parfois prises les décisions les plus importantes, justement parce que tout le monde est en vacances…
Ainsi par exemple, le 15 août 1971 Richard Nixon a pris la décision historique de ne plus rendre le dollar librement convertible en or, Georges Pompidou a fait dévaluer le franc français de 12,5 % le 8 août 1969 ce qui a permis de prolonger la croissance et d’achever les 30 Glorieuses, etc.

Les résultats des tests de stress des banques menés par l’EBA sont globalement bons, à l’exception de Monte dei Paschi di Siena qui a déjà réussi l’exploit de détruire 8 milliards d’euros engloutis au cours de ces dernières années pour tenter de sauver cette banque qui n’a plus qu’un passé historique, en attendant de détruire encore 5 milliards supplémentaires pour la maintenir en survie.

La Banque de France a publié un communiqué triomphal de son gouverneur vantant la solidité des Gos banques françaises.

Donc, pour la nomenklatura bancaire européenne, tout va bien ! … mais pas du tout pour moi (et quelques autres personnes) sur la base de mes analyses qui se fondent sur des raisonnements fondamentaux élaborés en particulier par les gens de la Fed et divulgués par Alan Greenspan du temps où la dirigeait.

Pour rappel, la problématique bancaire est la suivante…

Les banques sont des entreprises dont la fonction principale est de prêter l’argent qu’elles ont (leurs capitaux propres) et de l’argent qu’elles n’ont pas mais qu’elles empruntent, ce qui représente des risques certains. Des limites existent à cet endettement !

Pendant des millénaires, les banquiers n’ont pas pu prêter beaucoup plus d’argent qu’ils n’en avaient car la confiance dans ce système bancaire était faible.
Par la suite, pendant un soixantaine d’années, après la Seconde guerre mondiale, des progrès considérables ont été réalisés dans tous les domaines et en particulier dans le secteur bancaire si bien que les gens de la Fed ont observé et pris en considération que les banques pouvaient emprunter 12,5 fois le montant de leurs capitaux propres pour financer leurs actifs, ce qui correspond au ratio dit Core Tier 1 qui devait être supérieur à 8 % et qui a été adopté par la BRI dans les années 80 comme une règle de base à respecter.

Après les turbulences financières de 2008, ce bon vieux Greenspan a relevé ses exigences en préconisant un multiple d’endettement de 10.

Il s’agit là d’une norme, c’est-à-dire que, d’après les observations de la Fed, statistiquement, les banques qui respectent cette règle prudentielle d’endettement, sont fiables car elles sont bien gérées, sans prendre trop de risques.

C’est simple, c’est clair, tout est simple disait Milton Friedman.

Oui, mais c’est trop simple et trop clair pour les banksters européens qui ne respectent rien et surtout pas cette règle qu’ils ne reconnaissent pas, officiellement du moins.

Alors, qui a raison ? Eux tous ou moi (presque) tout seul ?

En l’état actuel (de la médiatisation), ce débat ne peut pas être tranché.
Soit, mais quid de la réalité ?

D’abord, première réponse : aucune autorité bancaire dans le monde n’a eu l’idée de proposer des tests de stress pendant les soixante dernières années.
Pourquoi font-elles ces tests maintenant ?
La réponse est simple : parce que la confiance ne règne plus dans le système bancaire, en particulier européen, ce qui se comprend aisément quand on connait mes analyses des multiples d’endettement des banques (leur leverage).
Autre formulation : si les banques respectaient les règles prudentielles d’endettement, comme c’était le cas avant les turbulences financières, aucune autorité bancaire ne perdrait du temps, de l’argent et de la crédibilité en faisant de tels tests.

Qui a raison ? Quid de la réalité ?
Deuxième réponse : si le système bancaire euro-zonard était sain comme le prétend la nomenklatura bancaire dont l’EBA, pourquoi le marché interbancaire est-il bloqué ?
Là aussi, la réponse est simple : les banksters savent très bien que leur propre banque ne respecte pas les règles prudentielles d’endettement et qu’il en est de même dans les autres banques.
Ils n’ont donc pas confiance entre eux et ils n’acceptent pas, lorsqu’ils sont en position créditrice, de prêter leurs disponibilités à d’autres banksters car ils craignent de ne pas pouvoir les récupérer.
Ils n’acceptent de les verser qu’à la BCE… qui les prête aux banques en position débitrices.
Ainsi, le marché interbancaire ne fonctionne plus. C’est la BCE qui le remplace.

Qui a raison ? Quid de la réalité ?
Troisième réponse : la BCE prête 630 milliard d’euros à des banques de la zone auxquelles elle a acheté pour 1 640 milliards de titres… mais ces banques ne déposent en retour que 1 030 milliards ! Soit un trou de… 1 240 milliards qui confirme bien que beaucoup de banques de la zone euro sont en survie (grâce à ces 2 270 milliards d’euros que la BCE leur fournit dans des conditions très avantageuses).
Par ailleurs, la Banque de France prête en outre généreusement 300 milliards d’euros quasiment gratuitement essentiellement à ses Gos banques par le jeu des Titres de Créance Négociables pour qu’elles survivent !
Si les banques de la zone euro étaient fiables, elles ne seraient pas obligées d’emprunter tant de centaines de milliards !

Qui a raison ? Quid de la réalité ?
Quatrième réponse : toute la nomenklatura bancaire européenne triche sur les deux composantes du multiple d’endettement.
En effet, d’abord, au lieu de prendre en considération le véritable montant des seuls capitaux propres, elle admet que des obligations c’est-à-dire des dettes soient considérées comme étant du capital !
Il s’agit des Cocos (Contingent convertibles) des petits Suisses, les dettes dites subordonnées et même super-subordonnées ou titres hybrides dont usent et abusent les Gos banks.
Ensuite, au lieu de prendre en considération le total des dettes, les banksters se sont entendus pour prétendre que certains de leurs actifs sont sans risques, et ils se sont arrogé le droit de rapporter leurs capitaux propres à des actifs dits pondérés, donc artificiellement minorés.
Dans ces conditions, les banksters présentent des ratios dits de leverage excellents mais qui ne correspondent pas du tout à la réalité, tels que ceux que je calcule d’après la méthode préconisée par Alan Greenspan.

Qui a raison ? Quid de la réalité ?
Cinquième réponse, la capitalisation boursière de la plupart des banques européennes est largement inférieure à celle de leurs actifs tangibles, c’est-à-dire de leur valeur à la casse, ce qui signifie que les investisseurs ne sont pas dupes : les actions de ces banques ne valent pas grand-chose car ces banques sont pourries.
Après les déclarations dithyrambiques de la nomenklatura bancaire européenne, les cours de ces banques repartent à la baisse, considérablement pour certaines…

La situation catastrophique du secteur bancaire européen est de toute façon irrattrapable pour tout monétariste normalement constitué, ne serait-ce qu’à cause de l’importance de l’hypertrophie monétaire en M1.

Pour l’instant, tout va bien, pas de tsunami bancaire.

11 réflexions sur “Stress tests : banksters et moi… émoi !”

  1. Bonjour,

    Merci pour ce beau billet de synthèse. Une autre preuve que la situation n’est pas aussi brillante que ça est l’enthousiasme, disons modéré, des commentateurs officiels. Même lorsqu’ils reprennent les communiqués officiels, ça sonne faux. Les résultats boursiers s’en ressentent comme aujourd’hui.

    Bonne soirée

  2. bonjour. 7éme éléments: Black out total des pdg des nos GOS banques ! disparus,plus un mot,eux qui étaient tellement diserts il y a quelques mois !

  3. Les gos banques emploient des hommes, des femmes qui font carrière dans « l’encadrement ». C’est plutôt facile de de devenir cadre d’une Gos banques française. Un bac G, suivi d’un BTS, suivi d’une école de commerce peu regardante sur les critères d’admission car co dirigé par d’ancien « auditeur » anglo saxon issu pourtant de Cambridge UK. Mais au final on aboutit à des banques pourris alors que le système bancaire français devrait être le meilleur dans le monde. Quid de Scalbert Dupont ? Dexia toujours dans le top du top ?

  4. Si les PME étaient gérées comme ces banques, le fisc serait dans leurs locaux à longueur de journée et redresserait à tour de bras. Et là, personne ne réagit quand on considère des dettes comme du capital. Il y a vraiment deux poids, deux mesures dans ce pays.

  5. C’est comme pour les pays et entreprises surendettés dont les patrons, banquiers centraux et ministres des finances viennent « rassurer » les marchés en disant que tout va bien, qu’il honoreront leurs engagements, qu’ils ne dévalueront pas …

    En fait, c’est à partir de ce moment-là que les marchés commencent à comprendre qu’il y a un tas de cadavres dans le placard …

    Car après tout si tout va bien, pas besoin de venir dire à la TV qu’on ne va pas dévaluer le thai bhat ou le ringgit.

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