Agrégats monétaires du Japon

J’ai commencé à étudier les agrégats monétaires du Japon en 2004 et j’avais alors observé une hypertrophie surtout en M3-M2 qui représentait autour de 90 % du PIB d’après les chiffres publiés par la banque centrale.
Comme il était particulièrement pénible de récupérer ces chiffres sur le site de la Bank of Japan qui est manifestement infestée de gens aussi nuls que leurs homologues français (ceux de la Banque de France jugés nuls par ailleurs…), ce problème me semblait résolu dans la mesure où il est impossible de faire éclater une telle bulle sans provoquer une crise majeure, ce qui condamnait irrémédiablement la croissance du Japon à être… bridée, ce qui perdure effectivement.

Cependant, notre ami Fred de Saint Louis a eu la bonne idée par la suite de publier des séries statistiques longues sur les agrégats monétaires du Japon qui donnent une image fidèle de la situation compte tenu des compétences des gens de la Fed en ce domaine.
Ces séries ne sont pas toutes toujours aussi longue qu’il le faudrait, mais elles sont quand même très instructives…

Les séries les plus longues, celles des agrégats M1 et M2-M1 qui remontent à 1955, montrent que ces deux agrégats ont augmenté lentement et sagement pendant une vingtaine d’années, puis, de 1975 à 1991, les Japonais, sentant plus ou moins confusément que quelque chose n’allait pas bien quelque part, ont manifestement profité de la croissance pour accroitre anormalement leur épargne de précaution (M2-M1),

Document 1 :

Les chiffres sont en… milliers de milliards de yens !

Dans une troisième période, depuis le début des années 2000, rien ne va plus, c’est le plus grand désordre.

L’hypertrophie des agrégats monétaires s’est donc développée à la fin des années 70 et dans les années 80 en affectant également la trésorerie globale des entreprises (M3-M2),

Document 2 :

Comme les statistiques de M3 de notre ami Fred de Saint Louis ne débutent qu’à partir de 1980, il n’est pas possible de pouvoir affiner ces observations d’autant plus qu’il ne fournit qu’à partir de 1994 les chiffres du PIB nominal qui montrent clairement que l’hypertrophie en M2-M1 et en M3-M2 était déjà considérable,

Document 3 :

En effet, à titre de comparaison, aux Etats-Unis qui sont la référence en la matière, au début des années 90, M3-M2 fluctuait autour de 15 % du PIB et M2-M1 autour de 40 % (du PIB) !
Les Américains ont donc laissé faire les Japonais qui se sont fourvoyés dans une hypertrophie monétaire qui allait leur être irrémédiablement fatale, empêchant leurs entreprises très performantes de contrer le leadership américain.

Le Japon a connu lui aussi ses 30 Glorieuses mais depuis la fin des années 70, l’hypertrophie monétaire a cassé la croissance qui est tombée à 1 % (d’une année sur l’autre) à la fin du XX° siècle pour atteindre un 0 % fatidique depuis le début des années 2000,

Document 4 :

Comme notre ami Fred de Saint Louis ne publie plus les chiffres de la série de M3 depuis 2014, il n’est pas possible d’actualiser depuis cette date cette loi que j’ai découverte et mise en évidence, et qui est parfaitement respectée sur la base de ces données de 1995 à 2013, à savoir que la variation du PIB réel est inversement proportionnelle à celle de la masse monétaire libre,

Document 5 :

En effet, les variations opposées de la masse monétaire libre et du PIB réel sont clairement visibles sur ce graphique.

Un petit rappel pour comprendre ces problèmes : lorsque l’argent ne circule plus, c’est-à-dire lorsqu’un ou des agrégats monétaires augmentent, la demande stagne, ce qui fait diminuer la croissance du PIB réel, et inversement.

Par ailleurs, l’hypertrophie d’un ou de plusieurs agrégats est le résultat de la circulation d’argent non gagné qui provient généralement de la distribution d’aides dites sociales par des administrations publiques surendettées (pour M1 et M2-M1) et par l’application de règles comptables qui ne donnent pas une image fidèle de la réalité pour M3-M2.

D’après d’autres sources que celles de notre ami Fred, il est possible d’extrapoler les séries statistiques pour les actualiser : les tendances antérieures se poursuivent pour ce qui concerne la bulle en M1 qui s’accroit, les malheureux Japonais diminuant même leur épargne (proportionnellement au PIB),

Document 6 :

Pour ce qui concerne les trésoreries des entreprises, la situation semble stabilisée mais les chiffres peuvent ne pas donner une image fidèle de la réalité car beaucoup d’entreprises japonaises ont des disponibilités abondantes à l’étranger.

Compte tenu de ces données, la masse monétaire M3 du Japon représente maintenant 252 % du PIB annuel !

Document 7 :

Conclusions :

D’abord, une fois de plus, on constate que l’argent sain qui est le premier pilier des Reaganomics est la condition sine qua non de la croissance.

Ensuite, l’ancienneté de l’hypertrophie des agrégats monétaires du Japon montre que ce problème peut être durable et non rapidement létal, la croissance tombant irrémédiablement et durablement à zéro.

Enfin, pour restaurer une croissance normale, il est donc indispensable de rétablir les fondamentaux, à savoir de faire éclater les bulles monétaires, ce qui ne peut se faire que lors d’une crise majeure douloureuse, ce qu’ont fait les autorités américaines lors des dernières grandes turbulences financières qui se sont accompagnées de la plus grande crise depuis la Grande Dépression.
Une politique monétaire dite accommodante (c’est-à-dire une augmentation des crédits distribués par la banque centrale et des taux anormalement bas, voire négatifs) et (ou) une relance keynésienne par l’augmentation de l’endettement des administrations publiques ne produisent aucun effet positif.
Ces mesures ne font qu’aggraver la situation des entreprises et de la population
.

Tout est simple, pour tout monétariste normalement constitué.

17 réflexions sur “Agrégats monétaires du Japon”

  1. La monnaie d’un etat c’est comme une entreprise endettée , elle tue tout autour d’elle lorsqu’elle n’est pas saine.
    Comment faire éclater ces situations?
    Il faut d’abord la volonté.
    Il faut ensuite etre groupés.
    Ensuite entamer des actions de groupe.
    Qui lève le doigt pour faire sauter la marmite?
    Personne?
    Alors acceptez votre sort de misère ou foutez le camp ailleurs.

  2. Les Analyses démographiques sont tout aussi convaincantes !

    Le Japon commençant à vieillir, les Japonais épargnent de plus en plus … la consommation baisse, le rendement sur capital aussi, les gens sont obligés d’épargner plus !

    La bulle boursière et immobilière délirante n’arrangent rien.

    Et le pire … la population active baisse ce qui compte tenu des progrès de productivité amène la croissance à 0.

    Une population âgée est aussi moins susceptible d’innover.

    « La démographie fait l’Histoire »

    Eric Zemmour

  3. Bertrand, c’est exactement ce que je vais faire ! « Foutre le camp ailleurs »
    Car je ne crois plus à l’effet de groupe, la France est bien trop partagée (manipulée médiatiquement) et il y a encore beaucoup de moutons…

  4. j’ai visionné « la valise ou le cercueil » et mieux encore, j’ai pu voir en super 8 les films relatant l’histoire de l’Algérie: à l »époque, un certain Chevalier, jacques de son prénom était maire d’Alger et fût secrétaire d’Etat! (sa petite fille travaille dans la même boite que moi); si des évènements à venir sont à mettre en parallèle en France, alors oui il faut partir; mais la vie est faite de repères et plus on vieillit et plus il est difficile de les casser! et si on y arrive, encore ne faut il ne pas se tromper! partir, oui mais où?

    1. Je vois un triple intérêt à partir. L’insécurité, l’avenir sombre économiquement, les diverses taxes qui augmentent sans cesse (ce qui est lié au point 2).

      Ou ça ? dans un pays au climat constant en température ou y fait bon vivre, un pays franco-anglais (c’est plus simple) , un pays qui sait attirer les expatriés d’un point de vue avantage fiscaux et droit de résidence ! je vous laisse deviner… 😉

  5. C’est bien à Maurice ! 😉

    Le droit de résidence s’obtient en achetant un programme immobilier haut de gamme (PDS) réservé aux étrangers, le ticket d’entrée est de 500K$, ou création de société (soumis à commission), ou retraite sur place avec plus de 40K annuel déposé en banque sur l’ile…

    Plus de taxe d’habitation, plus de taxe foncière, impôts limités à 15% max et rien sur les plus-values !

    D’ailleurs il y à une des banques les plus sures du monde la bas (MCB), qui a séparé la banque d’affaire de la banque des dépôts. résultat : Leverage < 8.
    Je peux fournir le bilan détaillé de cette banque à Mr Chevallier si besoin 😉

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