Monétarisme : US QE / Marioles de la BCE

Un petit retour aux principes de base du monétarisme s’impose…
Il est regrettable que Milton Friedman ne soit plus parmi nous pour expliquer ce qui se passe dans le monde à partir du monétarisme.

Il répèterait certainement ce qu’il a dit lors de sa dernière intervention dans le Wall Street Journal, à savoir que le meilleur moyen d’intervention des banques centrales est l’open market (Open Market Operations, OMOs), c’est à dire l’achat ou la vente de bons du Trésor national sur le marché secondaire.

Cependant, il n’imaginait pas que ces opérations puissent porter sur plus de 4 000 milliards de dollars comme c’est le cas depuis quelque temps aux Etats-Unis !

Document 1 :

De tels montants sont possibles dans la mesure où la Fed dispose de 3 000 milliards de dollars de dépôts (ou réserves) et de 1 000 milliards en billets émis,

Document 2 :

Dans ces opérations, la Fed ne fait que faire circuler l’argent (qui est déposé par les banques) qui est de l’argent gagné déposé par d’autres entreprises qui ont des disponibilités considérables.
Ainsi par exemple, l’une des entreprises les plus emblématiques des Etats-Unis, General Electric, a plus de 90 milliards de dollars de disponibilités (cash) qui alimentent finalement pour une très petite partie ces 3 000 milliards de réserves de la Fed.

La Fed ne fait que faire circuler l’argent sinon ces 4 000 milliards de dollars auraient été stérilisés, ce qui aurait été notablement déflationniste.

Ces opérations d’open market sont donc à la base de circulation monétaire. Il ne s’agit donc pas de création monétaire. La planche à billets ne fonctionne pas en de telles circonstances.
L’argent gagné reste sain aux Etats-Unis du moins, ce qui est le premier pilier des Reaganomics comme je l’ai écrit maintes fois.

Par opposition, la situation est tout à fait différente dans la zone euro car les banques ne déposent pas d’argent en masse à la BCE.

C’est même le contraire qui se produit : les banques empruntent plus de 500 milliards d’euros à la BCE car elles n’ont pas assez de disponibilités pour faire face à leurs besoins, ne pouvant pas compter sur les disponibilités des autres banques ayant une position créditrice (le marché interbancaire est bloqué car la confiance ne règne pas dans ce système où les banques sont trop endettées) et elles ne peuvent pas disposer non plus de dépôts de la part de leurs (gros) clients, surtout les entreprises dont les trésoreries sont exsangues,

Document 3 :

Comme le marché interbancaire est bloqué, les banques sont obligées de déposer leurs disponibilités en retour auprès de la BCE, mais pour moins de 300 milliards d’euros ! … la BCE n’équilibrant son bilan que grâce à 1 000 milliards en billets,

Document 4 :

Dans ces conditions, c’est-à-dire dans la mesure où la BCE ne dispose pas de réserves ni de dépôts, comment pourrait-elle acheter de mauvais bons de Trésors pour plus de 500 milliards d’euros ?

A ma connaissance, personne n’a répondu à cette question dans le monde de Bisounours euro-zonard.
En fait, les Marioles de la BCE vont certainement acheter ces mauvais bons de Trésors en recourant au tour de passe-passe par lequel ils ont déjà acquis pour près de 600 milliards d’euros de titres dits sécurisés.

La manip est la suivante : la BCE achète ces titres sans les payer dans un premier temps, les comptabilise dans ses comptes, puis, joue sur les dates de valeur en comptabilisant l’argent reçu par les banques qui déposent en retour à la BCE l’argent reçu de ces transactions !
C’est de la pure cavalerie, mais ça marche, pour l’instant du moins.

De toute façon, ces opérations d’open market que pourrait faire la BCE ne vont pas faire circuler de l’argent et elles n’auront aucune incidence positive sur la croissance.
Pire, en faisant baisser artificiellement les rendements des mauvais bons des Trésors euro-zonards, cette politique ne fait qu’accentuer les difficultés des banques qui peuvent difficilement gagner de l’argent en prêtant avec des taux anormalement très bas.

La vieille Europe continentale est profondément plombée pour longtemps par cette monnaie unique contre nature qu’est l’euro.

Cliquer ici pour lire une page de la Fed consacrée aux opérations d’open market.
Cliquer ici pour lire mon article précédent sur ce même thème.

16 réflexions sur “Monétarisme : US QE / Marioles de la BCE”

  1. bonsoir.merci pour ce génial éclairage !
    d’aprés ce que j’ai pu entendre des médias, la BCE cherche à créer de l’inflation en baissant les taux et espère que les acteurs économiques repartent à l’achat en anticipant cette fameuse inflation qui ainsi achèteraient vite avant que les prix ne montent encore plus.cette consommation créerait de la croissance,qui elle même ferait baisser les déficits et enclencherait un cercle vertueux.Je ne suis pas un fin économiste mais cette ultime pari me semble très très aléatoire.

  2. génial, infos que je voulais vous demander. Vu le bilan de la BCE, nous sommes mal barrés
    Katastrofe en vue …
    La BCE fera un faux bilan (ouh, c’est très vilain) ou bien titrisera je ne sais quel tombereau de dettes en portefeuille pour refiler le mistigri via ses copains golden boys, non ? Ce qui financerait son QE sauce (toxique) européenne
    il me semble avoir lu un truc comme çà en préparation. Nous verrons très bientôt

  3. Bonjour Monsieur Chevallier

    de combien l’or devrait augmenter pour que les bidouilles que vous expliquez se neutralisent ?

    si le prix de l’or augmente de 250% par rapport au cou s actuel on les trouve ces 500 milliards

    en gardant le taux de change actuel et un or a 2800 € ou 3250 $

    quel serait l’impact d’une forte réévaluation de l’or dans les balances des banques centrales ?

    quel traitement préconiseriez vous pour apurer les stocks de dette irremboursables dans l’ensemble des économies ? avez vous étudier les propositions de la BRI/BIS à ce sujet ?

    cordialement

  4. La planche à billets ne fonctionne pas en de telles circonstances. Certes, mais que se passera-t-il si les déposants venaient à utiliser fortement leurs dépots pour des acquisitions externes ? La FED devra bien trouver les fonds quelque part ? On est donc bien en planche à billets à utiliser dans le futur en cas de besoin. Ai-je fais une erreur ?

      1. Mon interrogation est la suivante … Si la FED rachète pour 4000 mds USD de titres en utilisant l’équivalent d’argent gagné déposé par les banques à la FED, alors si pour une quelconque raison les banques retirent 2000 mds sur le mois alors que fait la FED pour trouver ces 2000 mds ? Merci pour votre éclairage …

        1. Les bk US via les entreprises US ont constitué $4 000 milliards de réserves déposées à la Fed au cours des années passées, elles ne les retireront pas du jour au lendemain mais lentement au cours des années à venir, donc pas de pb !

          1. Merci. Je comprends mieux, et il est clair que le risque que j’imaginais est plus que très faible. Bon WE, et merci encore pour les éclairages.

  5. Je n’arrive pas a à comprendre l’intérêt d’acheter des titres aux banques qui réinjectent quelques jours plus tard les sommes perçues par la BCE à la BCE…

    Qui m’explique l’intérêt de la manœuvre ?

    1. Maintenir artificiellement les taux bas en intervenant dans l’offre et la demande pour que ces porcs d’états euro-zonards puissent survivre un peu plus longtemps, continuer a s’endetter, et maintenir le peuple de goche, qui leur mange dans la main, en captivité.

  6. Peut être que les banques n’arrivent plus trop a le faire elles mêmes (pour maintenir l’illusion), et qu’elles sont contentes de se décharger de la responsabilité de ces junk bonds qu’elles vont en plus pouvoir vendre pour cher.

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