Les icebergs de Méditerranée

De très gros et très méchants icebergs dérivent en Méditerranée. Ils menacent encore et toujours le Titanic qu’est l’euro-système, du moins tant qu’il n’aura pas éclaté.

Ce qu’on voit, c’est la partie émergée, c’est-à-dire les dettes des Etats, surtout de la Grèce et de ces cochons de pays du Club Med (dont la France). Ce qu’on ne voit pas, c’est la partie immergée, la plus importante, la plus dangereuse, celle des dettes de ces nations.

L’euro-système rend inopérant le jeu autorégulateur des marchés qui obligeait tout le monde à s’adapter à tout instant lorsque les monnaies nationales existaient, ce qui permettait d’atteindre la croissance optimale dans tous les pays européens.

Les excédents de la balance commerciale de l’Allemagne sont redirigés plus ou moins discrètement depuis une dizaine d’années vers ces cochons de pays du Club Med (dont la France) qui peuvent ainsi continuer en toute quiétude à accumuler des balances commerciales déficitaires.

D’après les données fiables de la Banque de France, la position nette de la France vis-à-vis du reste du monde tournait aux alentours de 200 milliards d’euros depuis le début des turbulences financières initiées par le bombardier furtif B-2, Ben Bernanke,

Document 1 :

Cependant, ces données ne donnent pas une image fidèle de la réalité car elles n’intègrent pas le fait que les deux tiers de la dette de l’Etat français ont été souscrits par des non-résidents, c’est-à-dire des étrangers, ce qui diminue d’autant les chiffres de la position extérieure (document précédent),

Document 2 :

En effet, les investisseurs étrangers en dehors de l’euro-système, principalement américains et arabes (des pays producteurs de pétrole) en bons du Trésor français font entrer des devises dans les comptes de la maison France.

En d’autres termes, plus la dette de l’Etat français augmente, plus les entrées de devises augmentent, ce qui compense paradoxalement le déficit de la balance commerciale et permet d’établir l’équilibre de la balance des paiements sans faire apparaitre ces déficits.

Comme la dette de l’Etat se montait à 1 316 milliards d’euros fin janvier dernier d’après l’AFT…

Document 3 :

867 milliards d’euros environ sont entrés dans les comptes de la balance des paiements de la France (sous la forme de devises), ce qui diminue en apparence la dette de la maison France qui est en fait supérieure à 1 000 milliards d’euros !

Les 1 136 milliards d’euros de la dette de l’Etat sont gérables, c’est-à-dire supérieurs aux normes mais dans une zone encore acceptable. Par contre, les dettes de la France, supérieures à 1 000 milliards d’euros, devront d’une façon ou d’une autre, être rattrapées dans l’avenir, soit par leur paiement (par un serrage de ceinture), soit par les créanciers (par un défaut de paiement).

La Grèce est depuis mai 2010 dans ce cas. Les autres pays du Club Med sont en attente.

1 000 milliards d’euros, c’est en gros la moitié d’un PIB annuel, ce qui signifie que les Français devront travailler 6 mois pour rattraper les errements de cette aberration que constitue l’euro.

Cliquer ici pour voir le rapport annuel de la Banque de France d’où sont tirés les documents ci-dessus (position nette, tableau 4.1 page 75).

17 réflexions sur “Les icebergs de Méditerranée”

  1. j’ai déjà vu d’autres schémas recoupant ces chiffres.

    M.Chevallier, ces 2200 milliards (1316+867) dans votre calcul, comptent-ils le financement de toutes les dettes ?

    J’avais vu les 1400 officiels + cades + unedic + collectivités diverses ville région département …. pour des choses proches des 2500 milliards

  2. C’est très intéressant. Donc si j’ai bien compris, et c’est brutalement et nettement logique, il y a un intérêt certain pour la France de contracter des dettes auprès des non-résidents: faire rentrer des …. dollars, par exemple, qui autrement sont quand même denrée rare?

    C’est béton, sauf qu’à la fin, on se tire dans le pied…. ou ailleurs.

    Reste à voir combien de temps la danse durera, et quand la musique s’arrêtera, qui est celui qui n’aura pas de chaise? 🙂

  3. N’y aurait-il pas aussi des français qui détiennent des actifs à l’étranger (des créances sur d’autres états que la France, des actions de sociétés étrangères, par exemple), sans compter les sociétés françaises qui détiennent des actifs dans une multitude de pays (mais qui sont aussi détenues par des personnes de multiples pays), ou même les quelques actifs de l’Etat français à l’étranger (la villa Medicis à Rome, etc.) ?

    Bref, quelle est la fiabilité des conclusions qu’on peut tirer des chiffres de la BdF, et d’un raisonnement comme celui de JP.Chevallier dans ce billet ?

    1. Oui, mais les bons spéculateurs, ceux qui ont investi hors de France, ne vont pas faire rentrer leurs capitaux en France quand elle sera au bord du gouffre ! cf. ce qui s’est passé en Grèce. Il ne faut donc pas raisonner en net, mais en brut.

  4. Bonjour,

    Effectivement, ça ne peut pas durer éternellement. les nuages noirs s’amoncellent. Comme le souligne Vincent Bénard dans son dernier billet: « Après une plus ou moins courte période d’Euphorie, les problèmes de fond de la zone Euro ne sont pas réglés. » (http://www.objectifeco.com/economie/economie-politique/article/vincent-benard-l-isda-rectifie-le-tir-sur-les-cds-obligataires-grecs).
    Le site Zero Hedge publie une liste complète des expositions « délicates » à venir sans parachutes étatiques désormais: http://www.zerohedge.com/news/eight-hundred-pound-greek-gorilla-enters-room

    Bonne journée

      1. Concernant les libertariens, M. Chevallier, vous admettrez sans doute que leur principal tort aura été de sous-estimer l’importance du soutien de l’Etat aux dites big banks US et de mal anticiper les actions de la Fed. Les facteurs politiques sont toujours les plus difficiles à prévoir, non ?

  5. Jp…. devenez candidat, on a pas ça chez nous…
    Ou changez de pays.
    Quiconque est élu sur votre programme sera d’office chargé d’augmenter les prélèvements directs ou les prélèvements vicieux (tva etc…)

  6. La BCE prête des centaines de milliards d’euros aux banques de la zone euro.
    Au 9 décembre 2011, l’encours de ces prêts était de 642 milliards d’euros.
    Au 16 décembre 2011, l’encours de ces prêts était de 665 milliards d’euros.
    Au 3 février 2012, l’encours de ces prêts était de 794 milliards d’euros.
    Au 17 février 2012, l’encours de ces prêts était de 796 milliards d’euros.
    Au 24 février 2012, l’encours de ces prêts était de 819 milliards d’euros.
    Au 2 mars 2012, l’encours de ces prêts était de 1130 milliards d’euros.

    http://www.ecb.int/press/pr/wfs/2012/html/fs120306.fr.html

    La BCE prête des centaines de milliards d’euros aux banques de la zone euro au taux de 1 % pour un prêt de 3 ans.

    Dans trois ans, en décembre 2014, les banques de la zone euro seront obligées de rembourser à la BCE ces centaines de milliards d’euros. Mais si elles ne peuvent pas rembourser, que fera la BCE ? La BCE leur prêtera de nouvelles centaines de milliards d’euros pour que le système puisse tenir encore trois ans, jusqu’en décembre 2017.

    Et ensuite, en décembre 2017, les banques de la zone euro seront obligées de rembourser à la BCE ces milliers de milliards d’euros. Mais si elles ne peuvent pas rembourser, que fera la BCE ? La BCE leur prêtera de nouvelles centaines de milliards d’euros pour que le système puisse tenir encore trois ans, jusqu’en décembre 2020.

    Et ensuite, en décembre 2020, les banques de la zone euro seront obligées de rembourser à la BCE ces dizaines de milliers de milliards d’euros. Mais si elles ne peuvent pas rembourser, que fera la BCE ? La BCE leur prêtera de nouvelles dizaines de milliers de milliards d’euros pour que le système puisse tenir encore trois ans, jusqu’en décembre 2023.

    Etc, etc.

    Et à la fin, ça finira bien.

  7. Méditerranée
    Aux îles d’or ensoleillées
    Aux rivages sans nuages
    Au ciel enchanté
    Méditerranée
    C’est une fée qui t’a donné
    Ton décor et ta beauté
    Mé-di-terranée!

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