€-crise, la Fed et le Donald, festina lente

Ce qu’on voit, ce sont les cours des actions qui montent. Tout le monde (et pas uniquement celui de la finance) en parle.
Ce qu’on ne voit pas, ce sont les variations de la courbe représentant l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans et ceux des Notes à 2 ans qui plonge inexorablement depuis début 2011,

Document 1 :

Ces variations sont pourtant très importantes car elles révèlent des tendances lourdes et longues qui ne peuvent pas se renverser brusquement et qui sont une des conséquences de l’€-crise en gestation.
On voit ainsi apparaitre clairement des cycles qui se succèdent. Les interprétations sont les suivantes…

Au départ de cette période commençant en 2000, la courbe représentant l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans et ceux des Notes à 2 ans est au plus bas, la courbe des taux est dite inversée (en valeurs négatives), c’est-à-dire que les membres du FOMC ont relevé le taux de base de la Fed (sur lequel se basent les taux courts) au-dessus de celui des rendements des Notes à 10 ans (qui sont la référence des taux longs) pour faire éclater une bulle qui s’était développée dans les sociétés liées à internet.
Cette bulle a effectivement éclaté un an plus tard, en 2001, en provoquant la chute des dot-com et une petite récession.

Pour relancer la croissance, les membres du FOMC ont ensuite baissé le taux de base de la Fed, ce qui a fait augmenter l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans et ceux des Notes à 2 ans dont la courbe le représentant a bondi pour atteindre un sommet en 2003.

Document 2 :

La croissance étant restaurée, une nouvelle bulle monétaire s’est alors développée dans l’agrégat M3-M2 car les banksters ne respectaient plus les règles prudentielles d’endettement (un leverage inférieur à 12).
Une fois encore, les membres du FOMC ont relevé le taux de base de la Fed au-dessus de celui des rendements des Notes à 10 ans pour faire éclater cette nouvelle bulle : la courbe des taux s’est alors inversée à l’été 2006, ce qui a provoqué la Grande Récession qui a commencé un an et demi plus tard en octobre 2008.

Une fois encore, pour relancer la croissance, les membres du FOMC ont baissé le taux de base de la Fed au plus bas, ce qui a fait augmenter l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans et ceux des Notes à 2 ans dont la courbe le représentant a donc bondi pour atteindre un sommet en 2010.

Par la suite, les membres du FOMC ont voulu briser ces cycles et ils ont été en mesure de le faire car les fondamentaux de l’économie des Etats-Unis étaient restaurés : l’argent était redevenu sain, sans hypertrophie monétaire, ce qui est le premier pilier des Reaganomics, dixit Arthur, Laffer.
Ils pensaient contrôler la croissance en contenant l’inflation en maintenant l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans (dans la bande des 3 %) et ceux des Notes à 2 ans (dans la bande des 2 %) dans la bande d’équilibre des 100 à 150 points de base (bande verte),

Document 3 :

Cependant, la création monétaire qui s’est développée dans la zone euro a contrarié ces plans : dès le début de l’été 2011, la crise dans la zone euro s’est exacerbée au point de menacer la croissance américaine (des Etats-Unis), ce qui a fait plonger les rendements des Notes à 10 ans.
Les autorités euro-zonardes ont réussi à endiguer cette première manifestation de crise en dépensant des centaines de milliards d’euros.
En conséquence, les rendements des Notes à 10 ans ont rejoint leur tendance longue en janvier 2014 mais comme les causes de l’€-crise n’ont pas été supprimées (car la création monétaire a continué), les rendements des Notes à 10 ans ont recommencé à chuter immédiatement.

Pour éviter que les rendements du Bund tombent en territoire négatif (avec pour conséquence un €ffondrement), les membres du FOMC ont sauvé l’euro-système lors de leur réunion du 28 avril 2015, ce qui a permis aux rendements des Notes à 10 ans de presque rejoindre leur tendance longue en juillet 2015, mais une fois de plus, comme les causes de l’€-crise n’ont pas été résorbées (car la création monétaire a encore continué), les rendements des Notes à 10 ans ont recommencé à chuter.

Enfin, c’est l’élection surprise (pour ses adversaires et pour les mauvais spéculateurs) du Donald qui a fait rebondir les marchés américains et par voie de conséquence les marchés européens, ce qui a encore donné un répit à l’euro-système mais une fois de plus, comme les causes de l’€-crise n’ont pas été résolues (car la création monétaire a inexorablement continué !), les rendements des Notes à 10 ans ont recommencé à chuter !

Après ces trois premiers plongeons et leurs trois sauvetages plus ou moins miraculeux, le quatrième plongeon qui est en cours devrait se poursuivre jusqu’à son terme, c’est-à-dire un €ffondrement comme le montre la courbe représentant l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans et ceux des Notes à 2 ans qui devrait tomber au plus bas, la courbe des taux étant alors inversée.
En effet, depuis le début de l’année 2017, la tendance lourde, longue et quasiment constante de cet écart est baissière, la dernière réunion du FOMC n’ayant pas eu l’effet de la redresser,

Document 4 :

Si cette tendance baissière se poursuit, l’écart entre les rendements des Notes à 10 ans et ceux des Notes à 2 ans devrait atteindre le zéro au plus tôt en février et au plus tard en août prochain,

Document 5 :

La courbe des taux (américains) sera alors plate et très certainement même inversée car les bons spéculateurs auront bien anticipé que l’euro-système n’allait pas pouvoir éviter le grand crash qui devrait se produire logiquement au même moment ou un peu plus tard,

Document 6 :

Cette inversion de la courbe des taux produira les mêmes effets que précédemment, à savoir une récession aux Etats-Unis, vraisemblablement juste après l’€-crise, c’est-à-dire à partir de 2020, en concordance avec les cycles précédents.

Ainsi, cette récession américaine ne sera pas causée par une bulle monétaire aux Etats-Unis mais en Europe, ce qui produira donc des dommages collatéraux dans le monde entier car la vieille Europe continentale est quand même un gros morceau de l’activité économique mondiale.

Cette €-crise s’est développée bien entendu à cause de cette monnaie contre nature qu’est l’euro.
Les bons spéculateurs l’ont bien analysée et bien repérée. En effet, les écarts entre les rendements des mauvais bons à 10 ans de Trésors de l’euro-zone par rapport à ceux du Bund ont commencé à être significatifs depuis le mois de juillet 2007,

Document 7 :

Ces écarts ont même été considérables au plus fort de la crise de 2011 à 2013 pour ces cochons de pays du Club Med,

Document 8 :

Conclusion : la probabilité de survie de l’euro-système au-delà de 2019 est quasiment nulle, 2018 devant être enfin le début de sa fin !

Cette conclusion n’est pas le résultat d’élucubrations plus ou moins fiables et subjectives mais de raisonnements logiques à partir l’évolution de données objectives observées sur une longue période qui viennent renforcer les analyses monétaristes qui sont toutes concordantes.
En effet, une monnaie unique pour des pays indépendants et souverains qui ont des niveaux et des gains de productivité différents les uns des autres est une aberration qui ne peut conduire qu’à une création monétaire létale à terme, ce terme arrivant enfin.

D’autres éléments confortent cette conclusion comme par exemple le fait que le Mariole de la BCE a avoué qu’il ne voyait pas la fin du tunnel, c’est-à-dire la fin de cette politique monétaire menée pour essayer de sauver ce qui ne peut pas l’être.
Il a d’ailleurs pris les dispositions nécessaires pour pouvoir prendre tous les pouvoirs dans la gestion des banques sur le point de faire faillite.
Par ailleurs, Janet Yellen a avoué imprudemment que les membres du FOMC devaient impérativement relever le taux de base de la Fed pour pouvoir… le baisser à l’avenir afin de relancer la croissance après une récession, sans oser dire évidemment qu’elle serait due à l’€ffondrement.
Enfin, le Donald ne cache pas qu’il ne supporte pas que les entreprises allemandes puissent bénéficier d’une monnaie sous-évaluée. Un €clatement aura évidemment l’avantage de restaurer les monnaies nationales dans la future ex-zone euro, donc un deutsche mark fort pénalisant justement les exportations de produits made in Germany.

La création monétaire qui est à l’origine de la fin de l’euro-système aura bien entendu des conséquences politiques, économiques et sociales considérables.
La seule antériorité fiable de référence à ce sujet est malheureusement celle de l’Allemagne de l’entre-deux-guerres.
Lire à ce sujet le dernier livre (en date !) de Pierre Jovanovic : Adolf Hitler ou la revanche de la planche à billets.

Tout est simple.
Festina lente (on n’est pas pressé depuis le temps qu’on dit que l’euro-système va sombrer, on étant tous les monétaristes normalement constitués).

27 réflexions sur “€-crise, la Fed et le Donald, festina lente”

    1. Ben tous les marchés vont continuer de monter pendant quelques mois … actions, oblig, matières premières, métaux précieux, bitcoin … le grand crash est pour 2019 ou 2020 …

  1. Etant également « réservé » sur l’EUR, anticipant également une relégation à un moindre rôle dans l’économie mondiale du USD (cf. coups de canif des BRICS, réserves d’or de certains pays « orientaux »…), je suis surpris par le change qui est en faveur de l’EUR en cette année 2017 avec une belle réévaluation.

    Quel est votre opinion sur la paire EUR/USD ?

    Si l’EUR est voué à mourir, qui plus est à court terme, sa valeur contre les autres devises de vrait s’affaiblir, ce qui fut loin d’être le cas sur l’année 2017.

  2. Si vous êtes tellement sûr de vos analyses, conseillez les intervenants qui vous le demande.

    C’est pas aussi simple la finance, même pour un monétariste.

  3. J’ai pose la question a Monfinancier.com sur le retour aux monnaies nationales.D’apres eux ,il considere que la crise de l’euro est derriere nous!
    Je continue a investir quand meme des dollars sur mon compte interactive brokers en dollars!

  4. Bonjour Monsieur Chevallier

    Ca fait maintenant 5 ans que je suis vos rigoureuses analyses et tout ceci est passionnant et très instructif.

    Mais concrètement quand on est un petit français lambda avec 15.000 € d’épargne que préconisez vous pour sauvez son épargne de l’€ffondrement à venir ? Action américaine ? Japonaise ? Or ?

  5. Si l’euro venait à disparaître comme vous le souhaitez,je conçois bien le retour aux monnaies nationales dans les pays concernés mais en quelle devise seraient converties les euros devises détenues par des particuliers ou des états étrangers sur des comptes hors zone euros?

  6. € contre$. , les exports européens sont déjà 20% plus chers , attendons encore 25/30% et nous verrons les teutons quitter cette monnaie invendable , alors que tous leurs partenaires leur réclameront des compensations.
    Trop riche,trop cher , trop déséquilibré….tout s’arrete.

  7. Tout va bien

    la BCE après avoir acheter des obligations pourries d’Etats s’est mise à acheter n’importe quoi

    et voila : encore piégée avec Steinhoff !

    1. Oui, il achète tout ce qui passe maintenant. Et j’ai cru comprendre que sur certains marchés comme l’Italie, la BCE était largement un des plus gros intervenant du marché … Cela tourne à la manipulation de marché en fait.

  8. France….travailleurs productifs 5,8M , travailleurs résidentiels 7,8M , fonctionnaires 6,8M , chômeurs 2,5M
    Dettes ….n’en parlons pas…..pas la’ peine de rester en France…….fuyons…..en Russie ou dans un désert.

      1. Si cela suffit à la rendre multi-milliardaire lui et sa famille, il a bien raison de vendre maintenant plutôt que d’attendre pour gagner une somme plus grande que de toute façon il ne pourrait pas dépenser en 100 vies de débauches … Et en prenant le risque de tout perdre.

      2. « le cofondateur du site Bitcoin.com confie avoir vendu tous les Bitcoin qu’il possédait »

        Ne jamais croire un insider… En moins d’un an, le gus a déjà fait plus de 1000 fois la culbute avec saltos arrière et les doigts dans le nez en plus.

        Le Bitcoin a permis d’ouvrir des yeux, le blockchain nourrit enfin le débat et plus un seul gouvernement ne peut l’ignorer… Aux US, c’est l’armée qui rentre en jeu, la Défense passe à l’attaque !

        Le débat 2018 portera certainement sur toutes les déclinaisons et les économies que ce concept blockchain permet…Ceux qui aiment les surprises ne seront pas déçus, mais chut, nous sommes encore en 2017 et le Total Market Cap des cryptomonnaies : $640 milliards … Le trillion fin janvier n’est plus à exclure ! Les perturbations réseaux non plus…

  9. Vu que les establishment européens refuse contre vents et marées de sortir de l’euro, il n’est pas évident que la future eurocrise détruira la monnaie européenne. Ou alors elle éjectera quelques PIGS au passage avec peut être la France parmi elles … Vu qu’aucune réforme sérieuse de ce pays n’a été faite, ce serait logique (on est toujours à 3% de déficit avec 100% de dette et un prélèvement obligatoire record)

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