Les banques allemandes, et en particulier Deutsche Bank se débarrassent de leurs junk bonds avant qu’il ne soit trop tard : elles vendent les bons des Trésors français et italiens qu’elles détiennent avant que les autres investisseurs ne le fassent en catastrophe avec pertes et fracas.
Ce ne sont pas de… francs délires, mais le résultat de la réalité observable : depuis quelque temps, j’ai remarqué et écrit que les rendements de ces bons faisaient apparaitre mystérieusement des écarts considérables en cours de journée par rapport au Bund.
Ainsi par exemple, en fin de séance européenne, vendredi 29 juillet, les rendements du 10 ans français étaient à 3,225 % (d’après les données Bloomberg) et à 3,079 % en fin de séance américaine (d’après les données Reuters) alors que les rendements du Bund étaient dans les deux cas autour de 2,535 %.
Les rendements du 10 ans italien étaient respectivement de 5,868 % et de 5,725 %.
Les bons spéculateurs allemands anticipent une dévaluation potentielle de l’ersatz de franc français que constituent les bons à 10 ans du Trésor français par rapport au Bund (représentatif du deutschemark) de 27 % contre 21 % pour les Américains,
Graphique 1 :
Pour la lire italienne, l’écart est de 132 % contre 118 %,
Graphique 2 :
L’Italie est dans une situation proche de celle de l’Espagne…
Graphique 3 :
… ce qui rend furieux cet idiot nuisible de Romano Prodi (ancien leader de la gauche italienne et ancien président de la Commission Européenne) qui prétend que son pays est dans une meilleure situation que l’Espagne.
Etonnamment, il a fort judicieusement remarqué que Deutsche Bank s’était récemment délestée pour 8 milliards d’euros de bons italiens.
Encore plus étonnant, il a relevé que les bons des Trésors de la Grèce et du Portugal avaient un faible écart par rapport au Bund un ou deux ans auparavant, l’Italie pouvant subir le même sort qu’eux (ainsi que la France).
Jamais 2 sans 3 : de Romano Prodi s’est surpassé en notant fort judicieusement que 44 % seulement de la dette publique italienne étaient détenus par des investisseurs étrangers.
Ces trois éclairs de lucidité sont exceptionnels chez lui car il est persuadé que, si ses amis politiques reviennent au pouvoir, ils pourront sauver l’Italie de la chute des dominos euro-zonards.
En France, au 20 mars 2011, 65,2 % de la dette de l’Etat (qui se montait à 1 294 milliards d’euros), étaient détenus par des investisseurs non-résidents, ce qui faisait une position nette négative vis-à-vis de l’étranger de 985 milliards d’euros compte tenu des chiffres de la rubrique « Autres investissements » de la balance des paiements publiés par la Banque de France (142 milliards).
L’AFT ne publie pas encore le pourcentage de dette publique détenu par les étrangers fin juin 2011, mais, sur une base conservatrice de 65 %, la position nette réelle de la France se serait considérablement dégradée au 2° trimestre pour se monter à 1 052 milliards d’euros à cause de l’augmentation de cette dette publique et surtout à cause de la vente de ces bons du Trésor français détenus par les banques allemandes.
Juin 2010 (éval) | Fin 2010 | Fin mars 2011 | Fin juin 2011 (éval) | |
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Dette de l'Etat | 1200 | 1229 | 1294 | 1319 |
% / étrangers | 71,4 | 67,7 | 65,2 | 65 |
Dette / étrangers | 856,8 | 832,033 | 843,688 | 857,35 |
Position nette BdF | 147,319 | 183,738 | 141,949 | 195,418 |
Position nette réelle | 1004,119 | 1015,771 | 985,637 | 1052,768 |
Sommes en milliards d’euros.
Les dirigeants des banques allemandes sont maintenant de bons spéculateurs : ils voient juste et loin (même sans Axel Weber) alors que leurs homologues américains qui connaissent mal la réalité de la vieille Europe sont de mauvais spéculateurs qui devront subir des pertes importantes sur ces investissements perdants à terme.
Pour éviter le pire, les autorités françaises font valoir la note AAA de la France qui attire à tort les investisseurs américains. Cette solution a l’avantage de sauver les apparences à court terme, mais elle est létale à terme lorsque les dominos euro-zonards tomberont.
Bien entendu, aucun journaleux, aucun bonimenteur ne parle de ces problèmes…
Une fois de plus, j’ai le plus grand tort d’avoir raison avant eux.
Cliquer ici pour lire la déclaration de Romano Prodi publiée dans l’Il Messaggero du samedi 30 juillet.
Cliquer ici pour voir les chiffres de la dette publique française.
Cliquer ici pour voir les chiffres de la balance des paiements publiés par la Banque de France.
Bonjour,
Et bien, on sait au moins à quoi s’attendre dans les mois qui viennent. La grande Crise va-t-elle survenir avant mai 2012, là est la question me semble-t-il?
Pour autant, mes interrogations sont autres. Les médias bruissent du psychodrame de la dette américaine. Je me méfie ouvertement des dires et prises de position franco-française où le gentil Obama est systématiquement en butte aux sourds et néfastes agissements des méchants républicains (au passage, notons avec délices le paradoxe né de la différence d’emploi de ce terme entre notre pays et les vilains yankees). A vous lire, la situation aux US n’est pas la pire (B2 semble tenir la croissance autour de 2% l’an). Comment alors interpréter, comprendre et expliquer le problème de la dette US?
Merci de votre réponse. Bonne journée
« Etonnamment, il a fort judicieusement remarqué que Deutsche Bank s’était récemment délestée pour 8 milliards d’euros de bons italiens. »
Surtout en réaction au Financial Times : « L’ancien président de la Commission européenne et ancien Premier ministre italien Romano Prodi a accusé, samedi, dans le quotidien Il Messaggero, la Deutsche Bank d’avoir vendu la presque totalité de ses obligations d’État italiennes au cours des dernières semaines, soit 8 milliards d’euros, selon des chiffres révélés par le Financial Times. »
Résultat : elles [les banques allemandes] sont désormais moins exposées que les banques françaises (10 milliards contre 14 milliards). »
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2011/07/les-banques-allemandes-contre-la-zone-euro.html